ans le cadre du programme Bee « Biocontrôle et Equilibre de l'Ecosystème vigne », l’Inrae de Colmar a testé sur une vigne en place de pinot blanc l’intérêt d’un paillage pour lutter contre les adventices. « Nous avons choisi le paillage Duravigne de Phormium à base d’amidon de maïs. C’est un produit 100 % biosourcé et 100 % biodégradable. Nous avons choisi celui-ci car la société indique une durée de vie de 7 à 10 ans », a précisé Lionel Ley, de l’unité d’expérimentation agronomique et viticole de l’Inrae de Colmar, lors des rencontres viticoles d’Alsace organisées par l’IFV à Colmar le 10 avril. Les expérimentateurs ont installé la toile manuellement les 26 et 27 mai 2020. Ils ont placé deux bandes – une de chaque côté du cavaillon - qu’ils ont agrafé au centre et enterré les bords. La largeur du paillage était d’environ 50 cm, la vigne étant plantée à 1,65 m x 1,25 m.
« Les résultats agronomiques sont plutôt satisfaisants », a détaillé le chercheur. En comparaison de l’itinéraire classique où le cavaillon est désherbé chimiquement au glyphosate avec travail du sol en rattrapage, « le poids des bois de taille et les rendements sont peu différents avec toutefois une petite tendance à la baisse dans la partie paillée. En 2023, l’écart s’est creusé pour l’azote dans les pétioles et dans les moûts. C’est un résultat à rapprocher au taux de recouvrement par l’herbe », a-t-il toutefois nuancé. Car l’efficacité du paillage s’est érodée au fil du temps du fait d’une recolonisation de l’herbe sur les bords du paillage. En effet, la vigne étant étroite, le travail du sol entre les rangs de vigne a été plus compliqué. Les outils ont abîmé les bordures du paillage et ont projeté de la terre sur la toile, d’où un développement des adventices sur cette zone. En raison de ces difficultés, les expérimentateurs ont été contraints de réduire les passages dans les interrangs par rapport à la référence, ce qui a favorisé encore plus la pousse de l’herbe et donc engendré plus de concurrence. « Mieux vaut le réserver aux vignes larges », observe le chercheur.
Pas de hausse des températures sous le paillage
Les expérimentateurs ont également mesuré l’humidité du sol grâce à des tensiomètres installés sous le paillage. Contre toute attente, les résultats montrent que cette humidité n’était pas plus élevée sous le paillage. Idem pour la température. De plus, les mesures de Delta C13 montrent que la modalité paillée a stressé davantage. Lionel Ley explique cela par le fait qu’au lieu de s’infiltrer sous le cavaillon, l’eau a ruisselé sur le paillage et s’est redirigée sur les bordures. D’où un développement des adventices à cet endroit.
Lionel Ley souligne un autre inconvénient du paillage : son coût. « Il faut compter 1250 €/ha/an avec un amortissement sur 10 ans. La moitié de ce coût résulte des fournitures, l’autre moitié de la pose. Pour celle-ci, on a calculé qu’il faut 460 heures par hectare. C’est rédhibitoire. Ce serait intéressant d’avoir un système qui permet de mécaniser la pose ».
Pour toutes ces raisons, Lionel Rey indique que ce paillage est plutôt à réserver aux plantiers en veillant à ce que l’eau s’infiltre bien dans le sol.
Présent dans la salle, un conseiller indépendant a expliqué que les vignerons certifiés en HVE devaient faire attention aux apports exogènes de paille, copeaux ou écorces pour pailler les rangs. En effet, ces apports « peuvent faire exploser le bilan azoté car le nouveau cahier des charges HVE prend en compte l’azote total apporté et non l’azote minéralisé. Et dans ce cas, les vignerons risquent de dépasser la limite et donc perdre la certification ». A bon entendeur