t si la solution pour diminuer les sulfites dans les rosés, c’était de combiner bioprotection et tanins Å“nologiques ? Maëlys Puyo a testé cette piste lors de sa thèse à l’Université de Bourgogne à Dijon, financée par AEB. « La bioprotection empêche le développement des flores indigènes mais n’a qu’un faible effet contre l’oxydation. Elle ne peut donc pas se substituer au SO2. Par contre, les tanins présentent des propriétés antioxydantes. Ils peuvent représenter une alternative intéressante au SO2 pour protéger les moûts contre l’oxydation, et ainsi, la couleur des vins. »
Tout débute en 2019 quand Maëlys Puyo réalise des essais sur une vendange de pinot noir en Bourgogne. Dans la benne, elle ajoute la levure de bioprotection Primaflora (Metschnikowia pulcherrima) à hauteur de 10 g/hl. Après pressurage, elle répartit le jus dans différentes cuves : 2 cuves de contrôle (uniquement bioprotégées), 2 cuves avec 5 g/hl de tanins de noix de galle, 2 cuves avec 15 g/hl de tanins de quebracho et 2 cuves sulfitées à 5 g/hl de SO2.
« Les doses de tanins sont celles recommandées par AEB qui nous a fourni les produits, explique la chercheuse. La récolte a eu lieu par temps chaud. Comme nous n’avons pas pu refroidir les moûts, nous avons levuré 24 heures après pressurage. Après la fermentation, nous avons directement mis les vins en bouteille avec 3 g/hl de SO2 puis nous les avons conservés pendant 15 mois en cave à l’obscurité. »
Pour comparer la couleur des vins, la chercheuse s’est appuyée sur l’analyse CIELab qui est la méthode de référence. « Les mesures colorimétriques et les analyses chimiques des anthocyanes et des composés phénoliques confirment que la bioprotection seule ne protège pas de l’oxydation, confirme-t-elle. En revanche, l’ajout de tanins Å“nologiques combiné à la bioprotection a stabilisé la couleur du rosé, au même titre que l’ajout de SO2. » Dans cette étude, les tanins de quebracho se sont d’ailleurs révélés plus efficaces que ceux de noix de galle.
Ces tanins ont-ils impacté l’amertume ou l’astringence des vins ? Pour le savoir, Maëlys Puyo a réalisé une analyse sensorielle auprès d’un jury composé d’Å“nologues et d’étudiants en DNO. Là encore, pas de différence. « Aux doses utilisées, les vins avec tanins Å“nologiques ne sont pas plus astringents ni plus amers que le vin sulfité, souligne-t-elle. Nous n’avons pas non plus observé de différences significatives sur le paramètre « intensité du fruité ». »
Si les interactions entre les composés phénoliques naturellement présents dans les moûts et les tanins qu’on y ajoute représentent un sujet d’étude à part entière, les résultats de cette expérimentation semblent prometteurs pour diminuer le sulfitage des rosés. « Reste à étudier cette stratégie à plus grande échelle, sur d’autres cépages, d’autres millésimes et d’autres tanins » estime l’universitaire.