Le Japon lève officiellement l'obstacle réglementaire à l'exportation d'un futur avion de chasse
L'appareil, en développement avec l'Italie et le Royaume-Uni, pourra être exporté sous conditions vers une quinzaine de pays. Une décision aussi symbolique qu'économique.
Par Les Echos
C'est un pas de plus qui éloigne le Japon de sa doctrine pacifiste. Pour la deuxième fois en quatre mois, le gouvernement japonais a décidé d'assouplir les règles strictes qui s'imposent en matière de ventes d'équipement militaire.
Ce nouvel assouplissement permettra d'exporter sous conditions le futur avion de chasse que Tokyo développe en coopération avec Londres et Rome. Un appareil qui devrait voler d'ici 2035.
Une quinzaine de pays concernés
Dans le détail, cet assouplissement concerne uniquement les exportations du futur chasseur qui auront reçu l'aval du gouvernement. Et il se limite aux pays, actuellement au nombre de 15, disposant d'accords pour le transfert d'équipements de défense avec Tokyo dans le cadre desquels ils s'engagent à trouver une issue pacifique à tout conflit, dans le respect de la Charte des Nations unies.
Sont notamment concernés par cette autorisation les Etats-Unis, la France, l'Australie, l'Inde, les Philippines ou encore les Emirats arabes unis. Garde-fou supplémentaire, Tokyo a précisé qu'aucune livraison vers des pays impliqués dans des conflits ne serait autorisée.
Si la portée de cette mesure est limitée, elle n'est pas sans conséquences. Tout d'abord, c'est un nouveau coup de canif dans la doctrine nippone pacifiste qui prévalait depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Fin décembre, le gouvernement japonais avait déjà annoncé revoir ses restrictions sur les exportations militaires pour pouvoir livrer des missiles de défense Patriot aux Etats-Unis.
Ces assouplissements s'inscrivent aussi dans la nouvelle doctrine militaire du pays. Obligé de prendre en compte les ambitions régionales d'un voisin comme la Chine ou la menace constante que représente la Corée du Nord, Tokyo a, fin 2022, adopté une nouvelle doctrine militaire qui prévoit de considérablement augmenter le budget de défense sur cinq ans.
Amortir le coût de développement du chasseur
Cette décision permet aussi de lever un potentiel obstacle au développement du programme d'avion de chasse développé avec Londres et Rome. Sans pouvoir exporter l'appareil à des pays tiers, il semblait en effet difficile d'amortir les coûts de développement du futur chasseur.
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Au Japon, cette question de l'exportation à des tiers a donné lieu à des mois de querelle politique entre le Parti libéral-démocrate au pouvoir et son partenaire au sein de la coalition gouvernementale, le Parti de la justice et de l'intégrité. Dans le cadre du Programme aérien de combat mondial (GCAP), destiné à déployer d'ici 2035 un avion de chasse de pointe, le Japon, la Grande-Bretagne et l'Italie ont mis sur pied l'an dernier une organisation industrielle conjointe menée par le britannique BAE Systems, le japonais Mitsubishi Heavy Industries et l'italien Leonardo.
Dans ce cadre, les restrictions de Tokyo sur les ventes à l'étranger et sur les volumes de production auraient pu rendre le futur appareil financièrement inabordable, avec des coûts de développement extrêmement élevés pour une flotte réduite.