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La guerre de l'eau et des bassines fragilise les agriculteurs poitevins

Les agriculteurs portent plusieurs projets de réserves d'eau entre La Rochelle et Poitiers, notamment dans les Deux-Sèvres où une coopérative de l'eau rassemble 220 exploitants. Mais les anti-bassines ont remporté une bataille en mai contre cinq autres réserves déjà construites en Charente-Maritime.

Les 16 bassines en projet sont configurées pour 11,8 millions de mètres cubes.
Les 16 bassines en projet sont configurées pour 11,8 millions de mètres cubes. (DR)

Par Stephane Frachet

Publié le 29 juin 2022 à 12:40Mis à jour le 30 juin 2022 à 17:03

Manifestations, envahissements de chantiers, lacération de bâches et sabotage de vannes : la question de l'eau tourne à l'affrontement entre écologistes et agriculteurs sur le territoire qui va de La Rochelle à Poitiers. Pour comprendre l'enjeu, il suffit de consulter le bulletin ProPluvia du ministère de la Transition écologique, qui recense les arrêtés de restriction d'eau en France : la plus grosse tache rouge du pays, qui traduit un état de crise et l'interdiction de prélèvements depuis le 4 mai, couvre cette partie de l'ex-Poitou-Charentes.

Ici, le manque d'eau, les agriculteurs connaissent. « Il y a eu une prise de conscience que cette ressource allait manquer lors des sécheresses de 2005 et 2007 », se souvient François Petorin, exploitant à Priaires (Deux-Sèvres).

« Sans eau, c'est la mort de nos filières », clame un agriculteur

Depuis, ils se regroupent pour créer des réserves d'eau pluviales. Mais quinze ans après, elles sont encore rares, et contestées par des écologistes regroupés dans un collectif Bassines non merci.

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« Si rien n'est fait, c'est la pérennité de nos exploitations, de plusieurs filières dans les élevages caprin et bovin, le blé, le maraîchage, les semences et plusieurs centaines voire milliers d'emplois qui vont disparaître », résume François Petorin, l'un des 220 agriculteurs de la Coopérative de l'eau, une société qui porte le projet de 16 bassines collectives dans les Deux-Sèvres, validé par une concertation en 2018 intégrant les associations de protection de l'environnement.

Soixante millions d'euros sont budgétés, dont 70 % financés par les pouvoirs publics (Agence de l'eau Loire-Bretagne, plan de relance, Europe et région Nouvelle-Aquitaine). Un seul réservoir a vu le jour en mars, à Mauzé-sur-le-Mignon, « quatre ans après la date prévue », déplore François Petorin, qui espère que l'ensemble du programme sera terminé en 2025-2026.

Marais Poitevin asséché ?

Face à la pression, les agriculteurs ont diminué la taille des installations. « Nous étions sur 25 millions de mètres cubes d'irrigation avant le lancement du projet. Les 16 bassines sont configurées pour 11,8 millions de mètres cubes. Certains ont arrêté et ceux qui restent ont modifié leurs cultures pour consommer moins d'eau », poursuit François Petorin, tout en précisant que plusieurs de ses collègues sont déjà en bio, en HVE (haute valeur environnementale) ou en agriculture de conservation des sols.

Dans le camp des anti-bassines, on dénonce l'accaparement de la ressource. Le principal grief porte sur la préservation des rivières et du Marais Poitevin, l'une des plus importantes zones humides du pays. L'eau retenue ferait porter un risque d'assèchement, sans qu'on puisse mesurer si la raréfaction des pluies ne joue pas également un rôle.

Nappe phréatique

Plus au sud, en Charente-Maritime, la situation est devenue ubuesque : des agriculteurs unis dans une association ont construit cinq retenues, dont l'arrêté préfectoral d'autorisation vient d'être annulé par la cour administrative d'appel de Bordeaux. Motif : les irrigants n'apportent pas la preuve que leurs réserves n'entament pas la nappe phréatique.

« Notre modèle, c'est une agriculture familiale qui résiste dans un monde plus concurrentiel. Les écologistes nous cataloguent dans l'agro-industrie, et la justice nous demande des études d'impact qui nous ruinent », réagit Thierry Boucard, agriculteur à La Laigne (Charente-Maritime), propriétaire de mètres cubes d'eau désormais illégaux.

Stéphane Frachet (De notre correspondant à Tours)

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