[go: up one dir, main page]

Publicité

Vaccins : course-poursuite avec la grippe aviaire dans le Sud-Ouest

Face à la multiplication des épidémies, Ceva Santé Animale et Boehringer Ingelheim font des tests dans six élevages de canards du Gers, des Landes, de la Dordogne et du Tarn. La filière retient son souffle.

En cas de succès, le vaccin n'est pas attendu dans les élevages avant l'automne 2023.
En cas de succès, le vaccin n'est pas attendu dans les élevages avant l'automne 2023. (JEAN-PHILIPPE KSIAZEK/AFP)

Par Laurent Marcaillou

Publié le 30 sept. 2022 à 11:50Mis à jour le 30 sept. 2022 à 17:41

C'est une première, regardée avec espoir par toute la filière. Deux candidats vaccins contre la grippe aviaire sont testés sur des canards dans le Sud-Ouest. Il existait un vaccin pour les poules depuis une dizaine d'années mais il n'est pas adapté aux canards. Depuis le mois de mai, le laboratoire français Ceva Santé Animale et l'allemand Boehringer Ingelheim expérimentent deux molécules sur des milliers de volatiles dans six élevages du Gers, des Landes, de la Dordogne et du Tarn. Ce sont des vaccins de nouvelle génération, respectivement à base d'ARN messager et de protéines. Ils portent sur la protéine antigénique hémagglutinine du virus de l'influenza aviaire.

L'opération est pilotée par l'Ecole nationale vétérinaire de Toulouse et l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses). Le coût, estimé à 2,3 millions d'euros, est partagé par l'Etat et quatre régions, avec un apport du Comité interprofessionnel des palmipèdes à foie gras (Cifog) et des laboratoires. Ceva Santé Animale se dit confiant après les premiers essais. « Sur nos trois critères que sont la protection contre les symptômes, la réduction de l'excrétion et la possibilité de distinguer les animaux vaccinés des animaux infectés […], les résultats sont au rendez-vous », a assuré récemment son PDG, Marc Prikazsky, au « Figaro ». Mais le bilan de l'expérimentation ne sera rendu qu'à l'automne.

Arrêter l'infection

En cas de succès, le vaccin n'est pas attendu dans les élevages avant l'automne 2023. Il devra être efficace contre la maladie mais aussi contre l'infection, pour arrêter la propagation du virus. « La technologie innovante de ces candidats vaccins facilitera les tests permettant de détecter une éventuelle circulation de virus pathogènes chez les animaux vaccinés », explique Jean-Luc Guérin, professeur de pathologie aviaire à l'Ecole nationale vétérinaire de Toulouse et responsable des essais de la vaccination. « Il faut éviter de laisser se créer des porteurs 'sains', ce qui permettrait au virus d'évoluer vers des formes plus virulentes, voire d'être capable d'infecter l'homme à terme. »

Publicité

Autre condition, il faudra une réglementation européenne sur la vaccination. « Un projet de règlement européen devrait être publié à la fin de l'année ou début 2023 », indique Emmanuelle Soubeyran, directrice générale adjointe de l'alimentation au ministère de l'Agriculture et cheffe des services vétérinaires. Ensuite, il faudra définir la stratégie de vaccination en déterminant quelles espèces (poulets, canards…) et quelles régions sont concernées. Dans un premier temps, elle pourrait être limitée aux zones d'élevages denses pour tenir compte du coût du vaccin, pas encore déterminé. L'Anses proposera une stratégie au printemps.

Enfin, il faut s'assurer que les pays importateurs de canards acceptent les animaux vaccinés. Actuellement, les Etats-Unis, le Canada, le Japon et plusieurs pays asiatiques les refusent pour ne pas risquer d'importer le virus de l'influenza. « L'Union européenne a demandé à discuter du sujet à la prochaine conférence de l'Organisation mondiale sur la santé animale, en octobre en Sicile », ajoute Emmanuelle Soubeyran.

Convaincre les importateurs

La vaccination des canards serait un changement de stratégie, après avoir misé sur la biosécurité. Jusqu'à présent, les grands groupes volaillers refusaient la vaccination car elle leur ferme les portes de l'exportation. Après la dernière crise dévastatrice de 2021-2022, leurs positions ont évolué mais ils attendent que des garanties soient apportées aux pays importateurs, à ce jour réticents.

« Nous avons abattu 19 millions de volailles en 2021 et 2022 en France et l'indemnisation coûtera près de 1 milliard d'euros, rappelle Emmanuelle Soubeyran. Donc je pense que la vaccination peut être un outil complémentaire de lutte, même si nous devons continuer à développer la surveillance et la biosécurité dans les élevages. » La vaccination serait étendue aux autres espèces. Les Pays-Bas font des essais sur les poules et l'Italie sur les dindes. « Les résultats des différents essais pourront sans doute être mutualisés pour disposer d'un ensemble de données qui permettra de concevoir une stratégie vaccinale plus globale », affirme Jean-Luc Guérin.

DECRYPTAGE. Pourquoi n'en a-t-on pas fini avec la grippe aviaire ?

Laurent Marcaillou (Correspondant à Toulouse)

MicrosoftTeams-image.png

Nouveau : découvrez nos offres Premium !

Vos responsabilités exigent une attention fine aux événements et rapports de force qui régissent notre monde. Vous avez besoin d’anticiper les grandes tendances pour reconnaitre, au bon moment, les opportunités à saisir et les risques à prévenir.C’est précisément la promesse de nos offres PREMIUM : vous fournir des analyses exclusives et des outils de veille sectorielle pour prendre des décisions éclairées, identifier les signaux faibles et appuyer vos partis pris. N'attendez plus, les décisions les plus déterminantes pour vos succès 2024 se prennent maintenant !
Je découvre les offres
Publicité