Le Sénat argentin a approuvé définitivement, mercredi soir, l'attribution pendant un an au ministre de l'Economie, Domingo Cavallo, de pouvoirs spéciaux _ qu'il a toutefois limités _ pour lui permettre de sortir le pays de trente-trois mois de récession. Ces pouvoirs spéciaux constituent la seconde partie de la loi de compétitivité présentée la semaine dernière par le ministre. Les députés avaient auparavant adopté cette loi après 31 heures de discussions, tout en restreignant, là aussi, les pouvoirs demandés par le président Fernando de la Rua pour le père de la « convertibilité » établissant une parité de 1 peso pour 1 dollar depuis 1991.
Pas de privatisations par décret
Les parlementaires ont ainsi autorisé le gouvernement à engager une réforme de l'Etat, à modifier, entre autres mesures, les impôts et les péages, mais lui ont interdit de toucher à la « convertibilité », d'imposer des privatisations par décret, ou de modifier le Code du travail ou les lois sur la Sécurité sociale. Le plus sérieux revers pour le très libéral Domingo Cavallo consiste toutefois en l'interdiction de contracter des dettes en les garantissant par des avoirs ou des ressources publics.
L'intention de Domingo Cavallo était de gouverner grâce aux pouvoirs spéciaux, sans recourir au Parlement. Mais les députés et une partie des sénateurs (souvent du camp de l'Alliance de gouvernement qui soutient le président de la Rua), ont refusé de déléguer à une seule personne la totalité des pouvoirs dans un secteur de plus en plus sensible socialement. La montée en puissance de Domingo Cavallo fait de surcroît de l'ombre au chef de l'Etat, qui l'a appelé en dernier recours après les échecs des deux derniers ministres de l'Economie, José Luis Machinea et Ricardo Lopez Murphy.
Le nouveau « superministre » joue sur son crédit : il a tiré il y a dix ans l'Argentine de l'hyperinflation grâce à la loi instaurant une stricte parité du peso avec le dollar. Mais la relance de l'économie qui s'est ensuivie s'est accompagnée du plus fort taux de chômage de l'histoire argentine (18,3 %).