Par Denis Fainsilber
Le mot d'ordre de grève des hôtesses et stewards d'Air France et d'Air Inter a pris fin hier soir, mais le ton est monté d'un cran en interne après l'initiative de la direction consistant à modifier sa campagne publicitaire, lancée à la mi-septembre, pour dénoncer ce débrayage. « Cet écran publicitaire aurait dû être consacré à la présentation des nouvelles cabines d'Air France. Un produit révolutionnaire (...) Malheureusement, deux syndicats de personnel navigant commercial ont décidé de déclencher une grève. S'adapter ou mourir, l'immense majorité du personnel d'Air France a déjà répondu: vivre », explique, depuis mercredi dernier, un spot télévisé élaboré en toute hâte deux jours auparavant.
Un détournement de campagne destiné à envoyer un « message fort » aux clients et aux contribuables et parler au nom du personnel, expliqueton au siège. Accessoirement, la compagnie n'a pas voulu annuler ses écrans réservés depuis longtemps, par souci d'économie, préférant les utiliser en les adaptant aux circonstances.
Opposition entre les personnels
Considérant depuis longtemps que les navigants commerciaux (hôtesses et stewards) sont les plus rétifs au plan d'amélioration de la productivité et sont manipulés par deux syndicats corporatistes, Christian Blanc ne craint pas de les isoler, pour encourager le reste du personnel à saper leur mouvement. Car les PNC ne représentent que 6.700 salariés sur un total de 41.000 postes. A l'appui de sa démonstration, la direction estime que les hôtesses n'ont pas atteint les objectifs de productivité fixés dans l'accord-cadre de 1994, contrairement aux autres catégories de personnel. Affirmation contestée par les intéressés.
Cependant, cette stratégie de la division sociale peut se révéler très risquée. Les premiers visés (les syndicats de PNC) n'ont pas été les seuls, hier, à réagir, condamnant cette campagne visant à les « humilier publiquement ». Bon nombre d'organisations d'employés au sol ont dénoncé, hier, la méthode employée par la direction, y compris à Air Inter, qui n'est pas directement concernée par le détournement de message publicitaire. Le SNPL (pilotes) estime que ce geste marque une dérive dangereuse, tout le monde devant travailler ensemble dans l'entreprise. Chacun se souvient surtout que la grande grève de l'automne 1993 trouve son origine dans une opposition entre catégories de personnel.
D. F.