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People living in or travelling to endemic areas should be advised not to walk barefoot, as footwear and clothing in general can protect against puncture wounds.
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Mycétome

14 janvier 2022

Principaux faits

  • Le mycétome est une maladie infectieuse chronique des tissus sous-cutanés, destructrice, qui s’étend progressivement à la peau, aux tissus profonds et aux os.
  • Il peut être provoqué par différentes espèces de bactéries ou de champignons.
  • On observe le mycétome en milieu tropical ou subtropical, caractérisé par de courtes saisons des pluies et des saisons sèches prolongées favorables à la croissance des buissons épineux.
  • On ignore la charge mondiale de morbidité mais la maladie est endémique en Afrique, en Amérique latine, en Asie et en Europe.
  • Le mycétome est à l’origine d’une forte morbidité et a de nombreuses conséquences médicales, sanitaires et socioéconomiques négatives pour les patients, les communautés et les services de santé dans les zones touchées.
  • Il faut conseiller aux personnes qui vivent ou voyagent dans les zones d’endémie de ne pas marcher pieds nus, les chaussures et les vêtements en général permettent de se protéger contre les plaies par perforation.

Le mycétome est une maladie chronique du pied en général, mais il peut affecter n’importe quelle partie du corps. L’infection se contracte le plus probablement par inoculation de champignons ou de bactéries dans le tissu sous-cutané à la suite d’un traumatisme. À ce jour, plus de 70 bactéries et champignons ont été identifiés comme agents étiologiques.

Il affecte couramment les jeunes adultes, plutôt des hommes âgés de 15 à 30 ans, pour la plupart dans les pays en développement. Les plus couramment touchés sont ceux qui sont défavorisés sur le plan socioéconomique, ainsi que les travailleurs manuels, comme les agriculteurs, les manœuvres et les gardiens de troupeaux.

Le mycétome a de nombreuses conséquences médicales, sanitaires et socioéconomiques négatives pour les patients, les communautés et les autorités sanitaires.

On a signalé le mycétome pour la première fois au milieu du XIXe siècle à Madurai (Inde), ce qui l’a fait appeler au départ le pied de Madura.

On ne dispose pas actuellement de données précises sur son incidence et sa prévalence. La détection précoce et le traitement sont néanmoins importants pour réduire la morbidité et améliorer l’issue thérapeutique. 

Répartition géographique

On trouve les différents agents étiologiques du mycétome dans le monde entier, mais ils sont endémiques dans les zones tropicales et subtropicales de la « ceinture du mycétome », qui comprend notamment l’Éthiopie, l’Inde, la Mauritanie, le Mexique, la République bolivarienne du Venezuela, le Sénégal, la Somalie, le Soudan, le Tchad, la Thaïlande et le Yémen. Le nombre de cas notifiés diffère d’un pays à l’autre mais, actuellement, c’est au Mexique et au Soudan que la plupart des cas ont été signalés.

Transmission

La transmission survient très probablement lorsque l’agent étiologique pénètre dans l’organisme à la faveur de petits traumatismes ou de plaies par perforation, souvent dus à des piqûres d’épines. On peut clairement associer le mycétome et les personnes qui marchent pieds nus et les travailleurs manuels.  

Tableau clinique

Le mycétome se caractérise par l’association d’une masse sous-cutanée indolore, de multiples fistules et des écoulements avec la présence de grains. C’est dans ces grains que se trouve l’agent étiologique. Il se propage en général à la peau, aux structures profondes et aux os, entraînant des destructions, des déformations et une perte de la fonction pouvant être mortelle. Le mycétome touche souvent les extrémités, la région dorsale et le fessier, mais toutes les autres parties du corps peuvent être affectées. Du fait de sa lente évolution, de son caractère indolore, du manque important d’information et de la rareté des établissements médicaux et des structures de santé dans les zones d’endémie, de nombreux patients se présentent à un stade tardif et avancé de l’infection, lorsque le seul traitement possible est l’amputation. Les surinfections bactériennes sont courantes et peuvent provoquer des douleurs, une incapacité et une septicémie fatale (infection sévère touchant l’ensemble de l’organisme) en l’absence de traitement. L’infection ne se transmet pas d’une personne à l’autre.

Diagnostic

Le diagnostic du mycétome repose sur le tableau clinique et sur l’identification des organismes pathogènes, qui peuvent être détectés grâce à une biopsie à l’aiguille fine ou à une biopsie chirurgicale. Bien que l’examen des grains au microscope puisse être utile pour cette détection, il est important de poursuivre l’identification par la culture, mais même alors, des erreurs de classification sont possibles. L’identification par amplification en chaîne par polymérase (PCR) est la méthode la plus fiable mais elle a un coût élevé et il n’y a pas de techniques standardisées. Il n’existe pas de test de diagnostic rapide sur le lieu des soins utilisable sur le terrain. Les techniques d’imagerie (radiographie, échographie, imagerie par résonance magnétique ou scanner) permettent d’évaluer l’étendue des lésions et de planifier la prise en charge clinique.

Traitement

Le traitement dépend de l’agent étiologique. Pour le mycétome bactérien, le traitement consiste en une association d’antibiotiques, tandis que pour mycétome fongique, on associe des médicaments antifongiques et la chirurgie. Le traitement est long, a de nombreux effets secondaires, est cher, n’est pas disponible dans les régions d’endémie et, surtout, il est rarement satisfaisant. Dans le cas du mycétome fongique, les amputations et les rechutes sont courantes.

Prévention et lutte

Le mycétome n’est pas une maladie à déclaration obligatoire (dont la notification est exigée par la loi) et un système de surveillance mondial est toujours en cours d’élaboration. Il n’existe pas encore de programmes de lutte, sauf au Soudan. La prévention est difficile, mais il faut conseiller aux personnes qui vivent ou voyagent dans les zones d’endémie de ne pas marcher pieds nus.

Action de l’OMS et mesures prises au niveau mondial

Afin de renforcer les capacités nationales de lutte contre le mycétome, le Gouvernement du Soudan et l’OMS ont organisé le premier atelier international de formation sur le mycétome, qui s’est tenu à Khartoum du 10 au 14 février 2019. S’appuyant sur l’expertise du Centre de recherche de Khartoum sur le mycétome, cet atelier, auquel ont participé environ 70 agents de santé venant de pays d’endémie du mycétome, a fourni une occasion unique de partager des expériences et de standardiser les pratiques de diagnostic, de traitement et de surveillance.

Cet atelier a été suivi de la Sixième conférence internationale sur le mycétome (Khartoum, 15-17 février 2019). Les participants à cette conférence ont adopté l’Appel à l’action de Khartoum sur le mycétome, qui prie un large éventail d’acteurs de prendre des mesures de santé publique spécifiques, afin de réduire la charge de cette maladie.

Perspectives

L’élaboration d’une stratégie de santé publique de lutte et de prévention nécessite de collecter des données épidémiologiques sur la charge de morbidité, d’investir dans la recherche et le développement de produits de façon à pouvoir instaurer à faible coût la prévention, le diagnostic, le traitement précoce et la prise en charge des cas dans les milieux ayant peu de ressources. Actuellement, le dépistage actif des cas avec un diagnostic et un traitement précoces à l’aide des outils disponibles est l’approche la plus adaptée pour faire baisser la charge du mycétome.

L’approche la plus appropriée pour réduire la morbidité et les incapacités dues au mycétome est à ce jour la détection active des cas grâce à un diagnostic précoce et un traitement recourant aux outils actuellement disponibles. Toutefois, des mesures de santé publique de grande envergure sont nécessaires pour faire face à la charge du mycétome, notamment :

  • intégration de la maladie dans les services de santé nationaux, et mise en place d’un registre dans les pays touchés ;
  • intégration de la détection du mycétome dans l’approche relative aux MTN (maladies tropicales négligées) de la peau pour améliorer la détection précoce ;
  • amélioration de l’accès aux produits de diagnostic et aux médicaments ainsi que des protocoles de prise en charge des cas ;
  • renforcement des mesures préventives (par exemple le port de chaussures) pour réduire l’incidence ;
  • intensification de la sensibilisation des communautés affectées et des capacités des agents de santé.

Des études sur l’innocuité et l’efficacité du fosravuconazole dans le traitement du mycétome fongique au Soudan sont en cours, sous l’égide de l’Initiative sur les médicaments pour les maladies négligées (DNDi) et d’autres partenaires. Outre une augmentation du taux de guérison, le recours à ce traitement permettrait d’écourter le protocole thérapeutique, ce qui renforcerait l’observance du traitement et économiserait des ressources financières.