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Le gouvernement percuté par la flambée de violence en Nouvelle-Calédonie

Le projet de réforme constitutionnelle actualisant le corps électoral provoque le chaos dans l'archipel. Il doit être adopté ce mardi par l'Assemblée nationale malgré tout.

La Nouvelle-Calédonie est en proie au chaos depuis le début de la semaine.
La Nouvelle-Calédonie est en proie au chaos depuis le début de la semaine. (Theo Rouby / AFP)

Par Grégoire Poussielgue

Publié le 14 mai 2024 à 16:08Mis à jour le 14 mai 2024 à 19:16

Maisons et commerces incendiés, barrages, tirs à balles réelles, couvre-feu, aéroport et écoles fermés... La Nouvelle-Calédonie a replongé dans le chaos depuis le début de la semaine, renouant avec les heures les plus sombres de son histoire. L'examen du projet de loi constitutionnelle réformant le corps électoral pour les élections provinciales, actuellement en discussion à l'Assemblée nationale, a mis le feu aux poudres sur le Caillou. Les forces de l'ordre ont procédé à 82 interpellations ces deux derniers jours, a indiqué Gérald Darmanin.

Le ministre de l'Intérieur et des Outre-mer a « condamné de façon extrêmement forte ces violences », qu'il a qualifiées d'« émeutes commises par des délinquants, parfois des criminels ». Un total de 54 gendarmes et policiers ont été blessés, certains « gravement », a-t-il déploré, précisant que des familles de gendarmes avaient été « évacuées ».

Depuis la Savoie, où il visitait le chantier du tunnel Lyon-Turin, Gabriel Attal a appelé au calme et dénoncé les exactions. « La violence n'est jamais justifiée ni justifiable, a-t-il déclaré. La priorité, évidemment, pour nous, c'est de rétablir l'ordre, le calme et la sérénité. » Mais l'exécutif est sous forte pression.

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La réforme vise à dégeler le corps électoral figé depuis l'accord de Nouméa de 1998, en vue des élections provinciales de la fin de l'année (alors que des personnes résidants sur l'île depuis vingt-cinq ans ne peuvent aujourd'hui pas voter). Elle fait suite aux trois référendums qui ont eu lieu sur l'indépendance, rejetée à chaque fois. Le dernier a toutefois été boycotté par les indépendantistes. Les loyalistes sont pour cette réforme, les indépendantistes contre car ils craignent de se faire diluer et aucun terrain d'entente n'a été trouvé entre les deux partis. Les nouvelles règles prévoient qu'il faudra justifier d'une résidence de 10 ans en Nouvelle-Calédonie pour pouvoir voter aux élections provinciales.

La gauche demande le retrait du texte

Si elle affirme ne pas être opposée au dégel du corps électoral, la gauche demande avec insistance le retrait de la réforme, l'estimant mal préparée et mal menée. « La paix civile en Nouvelle-Calédonie est une chose fragile et on le voit. Il aura suffi de la volonté du gouvernement de passer en force pour que la situation s'embrase », a dénoncé au Palais Bourbon le député La France insoumise (LFI) Bastien Lachaud. Très critique sur la méthode du gouvernement, Jean-Luc Mélenchon a lui aussi demandé le retrait. « La solution, ce n'est pas les renforts de troupes. C'est l'abandon du projet incendiaire et le retour à la patience du dialogue », a-t-il estimé.

Renforts sur place

Gérald Darmanin a envoyé des renforts policiers sur place tout en se déclarant ouvert au dialogue. Mais le seul renfort de forces de sécurité ne sera pas suffisant faute d'accord politique entre indépendantistes et loyalistes. Historiquement traité par Matignon, le dossier néo-calédonien l'est aujourd'hui par le ministre de l'Intérieur, mais sa légitimité est contestée par les indépendantistes. Début mai, trois anciens Premiers ministres - Manuel Valls, Jean-Marc Ayrault et Edouard Philippe - ont appelé Gabriel Attal à reprendre la main.

Pour calmer le jeu et relancer le dialogue, Emmanuel Macron a proposé de recevoir les partis - loyalistes et indépendantistes. En signe d'apaisement, il avait aussi indiqué qu'il ne convoquerait pas immédiatement le Congrès en vue de l'adoption définitive de la réforme constitutionnelle , mais ses deux initiatives n'ont eu aucun effet. Sur place, l'exécutif est confronté à l'extrême violence de jeunes, malgré l'appel au calme de leurs aînés et des partis indépendantistes.

Mardi matin, la question du retrait du texte s'est posée. Le gouvernement a finalement opté pour le maintien, Les Républicains et le Rassemblement national étant pour cette option. Le vote était prévu mardi en toute fin de journée. L'exécutif a accusé LFI de faire de l'obstruction, le parti de Jean-Luc Mélenchon multipliant les amendements lors de l'examen du texte. Celui-ci a accusé le gouvernement de vouloir passer en force. Au Palais Bourbon, le débat sur la Nouvelle-Calédonie prenait les couleurs de celui sur la réforme des retraites l'année dernière.

Lors des questions au gouvernement à l'Assemblée, Gabriel Attal a exclu le retrait de la réforme, mais il a confirmé que l'exécutif était prêt à reporter le Congrès, le temps que les parties trouvent un accord politique. Mais l'heure tourne : le Congrès doit absolument être réuni avant le 1er juillet pour que la réforme puisse entrer en vigueur.

Pour l'instant, l'heure n'est pas à l'apaisement. L'ancienne secrétaire d'Etat et présidente de la Province Sud de Nouvelle-Calédonie, Sonia Backès, a dénoncé sur BFMTV du « racisme antiblanc » et une « volonté de faire partir ceux qui ne sont pas kanaks de Nouvelle-Calédonie ».

Grégoire Poussielgue

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