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Les cours du cacao s'envolent à des niveaux stratosphériques

Le prix de la tonne de cacao à New York est au plus haut depuis 1977. La récolte en Côte d'Ivoire et au Ghana a été décevante. En raison du système de contrôle des prix, les planteurs dans ces deux pays ne bénéficient pas encore de l'envolée des cours.

Au Ghana et en Côte d'Ivoire, le système de prix administrés protège les planteurs en cas de chute des cours, mais limite les gains quand ils grimpent.
Au Ghana et en Côte d'Ivoire, le système de prix administrés protège les planteurs en cas de chute des cours, mais limite les gains quand ils grimpent. (Sven Torfinn/Panos-rea)

Par Étienne Goetz

Publié le 24 janv. 2024 à 18:05Mis à jour le 24 janv. 2024 à 18:44

Le cacao n'aura peut-être jamais autant mérité son surnom « d'or brun ». Alors que les matières premières ont vu leurs cours sensiblement refluer en 2023 , l'ingrédient du chocolat a connu, à l'inverse, une hausse spectaculaire. Ses gains ont dépassé 100 % en l'espace d'un peu plus d'un an. Sur le marché à terme de Londres, le cours du cacao se traite à 3.799 livres sterling. Du jamais-vu depuis 1989, date à laquelle débute la cotation sur Bloomberg. A New York, la tonne s'échange même contre 4.877 dollars, un plus haut depuis… 1977 !

La flambée historique des cours du cacao s'explique par de mauvaises conditions météorologiques en Afrique de l'Ouest. La récolte dans les deux principaux pays producteurs, la Côte d'Ivoire et le Ghana, a été décevante. Les deux Etats produisent 60 % du cacao mondial. Pour la saison qui a commencé en octobre, seulement 951.710 tonnes ont été acheminées aux ports ivoiriens, soit 37 % de moins que les saisons précédentes. La production est également touchée par le vieillissement des cacaoyers et une maladie qui sape la productivité des champs.

Destruction de demande

Ces prix sont-ils tenables ? Vont-ils encore progresser ? « Le marché ne cesse d'enregistrer de nouveaux records », écrivent les analystes de Hightower Report cités par Bloomberg. Il est certes « vulnérable au risque de correction, mais on ne voit toujours pas de sommet », poursuivent-ils. Cette ascension devrait toutefois, tôt ou tard, prendre fin.

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« Les prix ne peuvent pas monter beaucoup plus haut, ils vont finir par avoir un effet correctif sur la consommation », explique Philippe Chalmin, professeur d'histoire économique à Paris-Dauphine et président de CyclOpe, qui publie un rapport sur les matières premières. L'expert rappelle que le chocolat n'est pas un bien essentiel et qu'on peut donc aisément s'en passer. Il est aussi possible de faire du chocolat, certes de piètre qualité, avec très peu de cacao.

Même son de cloche chez Citi. Les analystes de la banque américaine estiment que les prix vont atteindre leur pic dans les trois mois après avoir testé la barre des 5.000 dollars et celle des 4.000 livres sterling la tonne. « Ces niveaux pourraient être les points de bascule et déclencher de la destruction de demande », écrivent-ils dans une note.

Prix bord champ à la traîne

En Côte d'Ivoire et au Ghana, les planteurs ne profitent toutefois pas encore pleinement de l'envolée des cours. Les deux pays ont un système de prix administrés. Chaque année, le gouvernement fixe le prix bord champ, celui qui est effectivement payé aux planteurs, sur la base des ventes de l'année précédente.

La hausse des cours prend donc du temps avant d'arriver dans la poche des cultivateurs. Pour le moment, les planteurs ghanéens ne touchent que 1.800 dollars par tonne. En Côte d'Ivoire, c'est environ 1.600 dollars. Dans l'immédiat, ce sont donc les pays où les marchés sont libéralisés qui vont empocher le pactole. Il s'agit principalement du Brésil, de l'Equateur, du Nigeria et du Cameroun.

Hausse de la production

« Nous n'avons aucun contrôle des prix », explique à Bloomberg Ivan Ontaneda, président de l'association nationale des exportateurs de cacao (Anecacao) d'Equateur. « Si les cours montent sur les marchés à 4.000 dollars, nous payons 90 % de cette somme au planteur. C'est très, très important pour les producteurs », détaille-t-il.

Grâce à cette nouvelle manne, ces pays vont pouvoir immédiatement investir dans de nouvelles capacités de production. Or l'Equateur s'est fixé pour objectif de rattraper, voire de dépasser le niveau de production du Ghana d'ici à 2030. Et le Brésil espère doubler sa production d'ici à la fin de la décennie et recommencer à exporter.

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En Côte d'Ivoire et au Ghana, les planteurs ne seront incités à cultiver davantage de cacao qu'à partir d'octobre prochain avec la mise à jour des prix bord champ. « Il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain, juge Philippe Chalmin. Ce système joue en défaveur des planteurs cette année, mais il les protège pendant les années moins fastes ».

Etienne Goetz

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