Pauvres Saoudiennes...

Le roi Abdallah d'Arabie saoudite vient d'accorder aux femmes le droit de vote aux élections municipales, et promet d'en nommer quelques-unes à son « Conseil consultatif » qui, comme son nom l'indique, n'a pas de pouvoir de décision. On entend aussitôt des commentaires qui saluent cette avancée démocratique. Une jeune militante du droit des femmes dans ce pays se félicite de ce que « pour la première fois, les femmes seront des partenaires dans les prises de décision ». La même, il y a quelques mois, avait été brièvement emprisonnée pour avoir revendiqué le droit des femmes à... conduire une voiture. On la plaint, avec ses consoeurs, d'en être au point où en est l'affamé à qui on a jeté une miette de pain.

Il faut préciser en effet que ces élections municipales ne concernent que la moitié des conseils municipaux - dont l'autre moitié est nommée, ainsi que le maire -et que cette mesure ne sera applicable que dans quatre ans. Le retentissement donné à cette aumône prêterait à sourire si cette initiative du roi ne révélait pas de sa part un certain courage face aux usages moyenâgeux que sa dynastie a entretenus depuis qu'elle a restauré en 1902 dans son pays le wahhabisme, symbole de l'islam rétrograde. Son âge avancé explique peut-être qu'il juge pouvoir enfin entrebâiller, sans risque pour lui, la porte du bon sens. Si c'est le cas, il lui resterait peu de temps pour l'ouvrir un peu plus, tant elle est lourde.

Lourde de tous les droits que les femmes n'ont pas : les droits de conduire, de voyager, de travailler, de subir une intervention chirurgicale sans l'autorisation d'un mâle de leur famille, sans compter celui de s'habiller comme elles l'entendent, de choisir leur époux, de vivre enfin. Le clergé wahhabite a-t-il accepté ce nouveau droit symbolique pour mieux s'arc-bouter sur la négation des autres ? Quelle que soit l'évolution dans les mois qui viennent, les pauvres Saoudiennes viennent de si loin qu'on ne les verra pas de sitôt sortir de leur disette.