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L'euro, un havre de paix financier

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Publié le 31 août 1998 à 01:01

La semaine écoulée fut rude sur les marchés financiers, les changes n'ont pas fait exception. Le rouble est en chute libre ininterrompue, sans qu'il soit possible de savoir à quel niveau il peut s'arrêter, d'autant plus que les intentions de remettre en marche la planche à billets ne devrait guère soutenir la devise. « La profondeur de la crise financière actuelle exige un mécanisme particulier pour stabiliser la situation, prévoyant un rôle renforcé de l'Etat et de l'inflation », a ainsi déclaré Alexandre Chokhine, chef de la fraction gouvernementale à la Douma. Mais outre le rouble, sur lequel peu d'illusions persistent _ aux dernières cotations identifiées il fallait 11,75 roubles pour acheter 1 dollar _, de nombreuses devises ont connu une semaine noire. Au premier rang desquelles les devises d'Europe de l'Est, avec notamment le zloty polonais, même si l'économie du pays est peu dépendante de celle de la Russie. Mais la devise ukrainienne s'est trouvée en première ligne. Le président de la Banque nationale d'Ukraine (BNU), Viktor Iouchenko, a ainsi déclaré jeudi qu'il n'excluait pas d'élargir la fourchette de fluctuation de la monnaie nationale. « Nous n'excluons pas d'avoir à élargir la fourchette de fluctuation de la hryvnia », a indiqué Viktor Iouchenko, mais « aujourd'hui comme hier, il y a aucune raison économique pour dévaluer la monnaie ukrainienne ». La hryvnia peut actuellement fluctuer entre 1,75 et 2,25 hryvnias pour 1 dollar. Vendredi, 1 dollar s'achetait 2,2491 hryvnias. Un élargissement du corridor pourrait entraîner une dévaluation de facto de la monnaie ukrainienne, suivant le modèle russe.

En Amérique latine, particulièrement sous surveillance puisque les investisseurs craignent une contagion de la crise vers cette région, le bolivar vénézuélien a fortement subi les inquiétudes sur l'économie du pays dont l'essentiel des recettes provient du pétrole. Le cours de cette matière première a chuté depuis un an. Du côté mexicain, le calme n'est pas non plus à l'ordre du jour. La Banque du Mexique a ainsi annoncé sa nouvelle stratégie : elle consistera en des interventions, jusqu'à trois fois par jour, dès que la dépréciation du peso par rapport au dollar dépassera les 2 %. La banque centrale indique qu'elle continuera d'intervenir à hauteur de 200 millions de dollars par jour comme c'est le cas actuellement sur sa monnaie, mais elle se réserve le droit de le faire en trois interventions quotidiennes au lieu d'une. La Banque du Mexique explique ses décisions par le fait que « les marchés financiers nationaux sont sur la période récente affectés par une volatilité inhabituelle et prolongée des marchés internationaux tant financiers que de matières premières », dont le pétrole que le Mexique exporte aussi en grandes quantités.

Du côté des « grandes » devises, la semaine fut agitée, et celle qui s'annonce ne devrait guère l'être moins. En cette période d'incertitude générale, le dollar a joué au Yo-Yo contre le mark comme contre le yen, pour finir en baisse contre les deux. Le billet vert n'arrive pas à profiter de la faiblesse de ces deux devises. Le mark est ainsi fragilisé par la crise russe, le risque de contagion à l'Europe centrale et les craintes pour le système bancaire allemand. Les monnaies scandinaves, en particulier suédoise et norvégienne, sont encore plus touchées. Mais cela ne bénéficie pas au dollar. Ces derniers jours, la baisse de Wall Street n'était pas pour rassurer quant à la santé à venir de l'économie américaine, tandis que la crise de confiance envers les marchés émergents touche également l'Amérique latine, avec sa contagion possible vers les Etats-Unis. Au total, le billet vert a ainsi reculé face au mark, passant de 1,7973 mark pour 1 dollar à 1,7730 mark d'un vendredi à l'autre, alors même que la barre de 1,80 mark avait été franchie jeudi dernier.

Du côté du yen, aucune embellie économique locale ne justifie la bonne tenue, même relative, de cette devise face au dollar. Elle bénéfice des mouvements de rapatriements de fonds vers le Japon. Le résultat est visible : le yen est passé de 144,80 yens pour 1 dollar à 142,83 yens d'une semaine à l'autre.

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Dans cet océan de baisse, il y a deux exceptions notables : le franc suisse et la livre sterling. Dans le premier cas, la crise a fait retrouver à la monnaie helvétique son traditionnel rôle de valeur refuge. Dans le second cas, la situation est plus complexe. L'économie britannique est en mauvaise santé, comme l'a démontré l'enquête très négative de la Confédération de l'industrie britannique (CBI) sur l'état et les perspectives de l'industrie manufacturière, avec une forte révision à la baisse des prévisions de croissance de l'organisation patronale pour 1999, passées de 2,1 % à 1,2 %. Mais les taux d'intérêt sont élevés, et la livre se retrouve, presque par défaut, en position de valeur refuge elle aussi. Face au dollar, sa progression est impressionnante, puisque d'un vendredi à l'autre, elle est passée de 1,6375 dollar pour 1 livre à 1,6705 livre. Face au franc, elle s'est aussi appréciée fortement, dépassant même jeudi les 10 francs, pour revenir vendredi à 9,91 francs.

Enfin, il faut noter la remarquable stabilité des devises qui constitueront l'euro dès le 1er janvier prochain. La crise que viennent de traverser les marchés financiers a démontré que, de facto, l'euro existe. Cela n'a pas échappé à Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie, qui a noté que la France n'est pas « complètement à l'abri malgré l'euro qui est une zone de stabilité dans cette crise », pas plus qu'à Romano Prodi, le président du Conseil italien. Ce dernier a, en effet, remarqué que les monnaies « participant aux accords de change du Système monétaire européen » avaient bien résisté, en particulier « celles, lire incluse, qui, à partir du 1er janvier prochain, donneront naissance à la monnaie unique européenne ».

ISABELLE EHRHART

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