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Sony entre à toute vapeur dans l'ère du numérique

Pour le nouveau président de Sony, le passage de l'ère analogique à l'ère numérique débouchera, à un horizon de quatre ou cinq ans, sur une convergence entre les métiers de l'audiovisuel et de l'informatique. C'est l'enjeu de la guerre des standards de CD Video numérique et le coeur de ses réflexions pour l'élaboration de la stratégie du groupe japonais.

Par Nicolas Barré

Publié le 31 mars 1995 à 01:01

« Mes prédécesseurs faisaient tous partie de l'équipe des fondateurs. Pour la première fois, le président de Sony n'a pas connu directement cette époque: j'ai été recruté il y a plus de trente-cinq ans, à la sortie de l'université. » D'entrée de jeu, Nobuyuki Idei, qui prend officiellement demain ses fonctions de président de Sony, se définit comme le représentant d'une nouvelle génération de dirigeants du groupe d'électronique japonais. Ce n'est pas seulement un symbole : « L'an prochain, Sony fêtera ses cinquante ans mais aussi la fin d'un cycle de son histoire. Nous nous sommes développés à partir de l'industrie des transistors, nous sommes devenus une référence dans l'industrie audiovisuelle, notre métier de base. Mais nous abordons aujourd'hui d'autres défis », a­t­il expliqué, hier, lors d'un entretien avec quelques journalistes étrangers. « J'ai été appelé pour gérer les défis de cette période de transition. »

Le principal défi de Sony, M. Idei le résume d'un trait: réussir le passage de l'analogique au numérique. « Pour conserver une position dominante dans nos métiers, nous devons devenir les maîtres du numérique », lance­t­il. Les métiers de Sony s'articulent, selon M. Idei, autour de trois domaines. En premier lieu: la production d'appareils électroniques, autrement dit en jargon électronique, le « hardware ». « C'est notre métier traditionnel. Nous sommes reconnus partout dans le monde pour nos appareils audiovisuels. » Deuxième domaine plus à la mode: la production de « contenu ». « Avec Sony Music Entertainment et Sony Pictures, nous sommes passés du hardware au software, c'est-à-dire à la création, au contenu. » Enfin, M. Idei identifie, autour du développement des nouveaux réseaux de distribution audiovisuels (câble, fibre optique, satellite), une troisième source d'activité majeure pour le groupe. « Il ne s'agit pas pour nous de devenir opérateur de téléphone ou de racheter un réseau câblé. Mais ces réseaux de distribution génèrent des besoins _ en produits ou en programmes _ que nous devons être à même de combler. Il y a beaucoup de développements à prévoir dans l'évolution de ces formes de distribution, bref, dans ce que l'on appelle " multimédia ", même si je n'aime pas ce terme. »

Pas de cession
de Sony Pictures
Mais M. Idei va plus loin. « C'est un marché émergent pour nous mais aussi pour les informaticiens, les sociétés de téléphone et les producteurs. » D'où le démenti formel opposé aux rumeurs de cessions partielles dans la branche Sony Pictures, qui auraient permis au groupe de financer des investissements dans le câble : « Nous devons renforcer en même temps la production et la diffusion de films. Nous croyons à l'importance croissante des studios, et il n'est pas question de vendre, même partiellement, Sony Pictures . » Le câble ? « Il faut beaucoup d'argent pour s'y développer. Nous n'avons pas de stratégie précise encore dans ce domaine. La seule chose que l'on exclut absolument, c'est de devenir un opérateur de téléphone. »

Inébranlable partisan du système de CD Video numérique développé avec Philips, M. Idei estime que le temps n'est pas au compromis avec le camp adverse : « Nous croyons à notre idée qui consiste à étendre le format des CD que tout le monde connaît pour en accroître les usages et les capacités à d'autres domaines. La différence fondamentale avec le produit du camp opposé, c'est que le nôtre est un disque à face unique. » Quant aux problèmes de capacité, Sony et Philips estiment les avoir résolus grâce à un système de double impression du disque. Sony présentera, courant avril, un prototype de 7,4 gigabits qu'il estime pouvoir produire à l'échelle industrielle « courant 1996 ». Un produit que les deux groupes vont présenter à l'ensemble des industriels concernés : « Nous avons des accords de licence de notre technologie du CD avec plus de 400 entreprises dans le monde », rappelle M. Idei.
Rapprochement avec le monde informatique
L'enjeu de la mise au point de ce support multimédia donne une idée des changements à l'oeuvre dans toute l'industrie. « Aujourd'hui, la frontière entre l'industrie audiovisuelle et l'informatique est très nette. On ne peut pas utiliser un ordinateur à la place d'un enregistreur et vice versa. Mais les deux univers vont se rapprocher. Bientôt, dans quatre ou cinq ans, les ordinateurs pourront traiter de l'image en mouvement », dit M. Idei. Pour le moment, les systèmes d'exploitation de type Mac OS (Apple) ou Windows (Microsoft), conçus pour traiter des données, ne permettent pas, malgré leurs améliorations, de traiter de l'image en temps réel. Il faudra donc mettre au point un système d'exploitation d'un type nouveau. » D'où l'intérêt pour Sony de travailler avec ces deux sociétés : « Il existera dans quelques années des " PC audiovisuels " qui pourront remplir, par exemple, les fonctions d'un magnétoscope. Tout le monde travaille dans ce sens », ajoute­t­il.
Cette évolution est la conséquence obligée du passage de l'ère analogique à l'ère numérique : « On assistera à un phénomène de convergence. Le digital, cela signifie qu'il n'y a plus de différence entre données, musique ou films car tout est ramené à des bits. » Le président de Sony voit même l'étape suivante, celle où il sera possible à tout un chacun d'enregistrer sur un support de type CD multimédia. « Nous aurons alors un gros problème de " copyright " à résoudre. C'est sans doute la question la plus importante pour l'avenir. » Et notamment pour Sony qui, entre-temps, sera encore plus impliqué dans la production de « contenus » facilement duplicables.

Nicolas Barré

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