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Le mark en tête du SME

Par Nicolas Barré

Publié le 31 août 1992 à 01:01

On saura cette semaine si le « signal » adressé vendredi soir aux marchés par le Comité monétaire de la CEE est pris au sérieux par les cambistes. Car le Système monétaire européen (SME) vient de connaître l'une de ses semaines les plus noires. Malgré plusieurs interventions, les banques centrales se sont révélées impuissantes face à la force contraire du marché. Le bilan de la tempête à la veille du week-end était spectaculaire: le mark se trouvait en tête du SME, pour la première fois depuis la fin de 1989, tandis que la lire crevait le plancher du SME, menaçant ainsi l'édifice d'un réaménagement « à chaud ». Le tout sur fond de nouvel effondrement du dollar, qui devait s'inscrire jeudi à son plus bas niveau face au mark depuis la création de la devise allemande après la guerre...
Face à de tels mouvements, on peut se demander ce qui fait la valeur d'une devise. Car ici il n'est plus question d'éléments fondamentaux, ni même de taux d'intérêt (ils n'ont pas varié avec une égale amplitude), mais plutôt de spéculation. Or celle-ci peut être sans limite lorsque la menace d'un retour de manivelle - intervention des banques centrales - n'est plus prise au sérieux. Or c'est ce qui s'est produit la semaine dernière. Il faut dire que les responsables monétaires ont leur part de responsabilités: ainsi, alors que le mark s'envolait, un membre de la Bundesbank, Johann Wilhelm Gaddum, a cru bon de réaffirmer qu'il était hors de question d'abaisser les taux d'intérêt allemands.
Dans ces conditions, la lire, déjà considérablement affaiblie (dégradation de la notation de l'Italie, « affaire » de l'EFIM, dérive budgétaire...), a enfoncé son plancher face au mark (765,40 lires) et au franc belge. Les banques centrales allemande, belge et italienne ont donc dû intervenir pour endiguer cette dangereuse dérive. Mais, déjà, on redoute sur le marché une nouvelle faiblesse de la devise italienne. Or la Banque d'Italie, dont les réserves de devises ont fondu de plus du tiers au premier semestre, n'est pas dans la meilleure posture pour défendre seule la lire.
Dans ce contexte, le rappel par le Comité monétaire de la CEE d'une nécessaire « coopération » des Douze pour « garantir un fonctionnement adéquat du SME » prend tout son sens. En brandissant « l'arme » des accords de Bâle-Nyborg de 1987, qui permettent aux banques centrales d'intervenir sans attendre que les monnaies touchent leurs limites de fluctuation, les Douze espèrent « tuer » la spéculation.
Il en faudrait sans doute davantage pour enrayer la crise du dollar, source fondamentale de tension au sein du SME. Un élément positif toutefois: la remontée du yen face au dollar et surtout au mark. L'appréciation (encore très relative) de la devise japonaise par rapport au mark marquerait un tournant. En effet, depuis le début du mois de juin, le mark n'a cessé de se renforcer. Preuve que, si l'on peut parler de crise du dollar, il convient de ne pas perdre de vue la force intrinsèque - et parfois dévastatrice - de la devise allemande face à l'ensemble des monnaies.

Nicolas Barré

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