Le Covid-19 a été un accélérateur des crises alimentaires. Depuis le début de la pandémie, la malnutrition a progressé, exacerbée par les mesures de restriction prises partout dans le monde pour tenter d’endiguer le SARS-CoV-2. Files d’attente interminables devant les distributions des banques alimentaires des grandes villes européennes ; paysans africains devant jeter leurs récoltes faute d’avoir pu leur faire traverser les frontières ; travailleurs du secteur informel (restauration, coursiers, saisonniers…) se retrouvant sans emploi et sans filet de sécurité dans les mégalopoles du monde entier ; enfants privés d’école et de cantine scolaire… La malnutrition qui frappe une grande partie de la population mondiale prend de multiples visages.
Le rapport annuel sur la sécurité alimentaire, coécrit par cinq agences des Nations unies – Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), Organisation mondiale de la santé, Programme alimentaire mondial, Unicef et Fonds international de développement agricole (FIDA) – et publié lundi 12 juillet, le confirme : la pandémie a bien eu un impact massif, plongeant dans la faim 118 millions de personnes supplémentaires au cours de l’année 2020, pour un total de 720 à 811 millions de personnes sous-alimentées.
L’ONU estime ainsi à 9,9 % la part de la population mondiale souffrant de faim chronique (contre 8,4 % un an plus tôt), avec de profondes disparités régionales : en Afrique, plus d’un habitant sur cinq ne mange pas à sa faim (21 %, en hausse de 3 points sur un an), tandis que 9,1 % des populations d’Amérique latine et centrale (+ 2 points en un an) et 9 % en Asie (+ 1,1 point) sont concernées.
En élargissant à la notion d’insécurité alimentaire, plus vaste, qui désigne le fait de ne pouvoir accéder de façon régulière à une alimentation adéquate (réduire les portions par exemple, ou sauter des repas), la seule année 2020 a vu une hausse comparable à celle, cumulée, des cinq années précédentes : 2,37 milliards de personnes ont souffert d’insécurité alimentaire en 2020, soit 30 % de la population mondiale, en hausse de 320 millions par rapport à 2019. Pour la première fois, celle-ci a augmenté y compris sur le continent européen (+ 1,1 % pour un total de 9,3 % de la population européenne concernée).
« Face à l’impact de la pandémie, plusieurs pays ont pris des mesures palliatives, ce qui a permis d’éviter une situation de crise humanitaire, mais nous sommes face à une maladie qui vous ronge progressivement sans nécessairement montrer des symptômes », observe le président du FIDA, Gilbert Houngbo, dans un entretien au Monde.
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