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Stars d’Instagram, les « fake muses » séduisent les marques

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Publié le 22 juin 2018 à 14h36, modifié le 22 juin 2018 à 14h36

Temps de Lecture 3 min.

Miquela Sousa (@lilmiquela sur Instagram), 1,2 million d’abonnés, donne des interviews et soutient des causes telles que Black Lives Matter… Miquela Sousa (@lilmiquela sur Instagram), 1,2 million d’abonnés, donne des interviews et soutient des causes telles que Black Lives Matter…

« Quelle est la marque de ta veste ? », « Tu es habillée en Chanel aujourd’hui ? », « C’est quoi ta routine beauté ? » : ces commentaires ont été laissés sur le compte Instagram de Miquela Sousa (@lilmiquela), mannequin influenceuse de 19 ans originaire du Brésil.

Dans ses posts, l’instagrammeuse à la garde-robe streetwear a l’habitude de se plaindre de la fatigue (« J’ai besoin d’un jour au spa ») et de la chaleur ; en mai, elle a posé en couverture du magazine de mode pointu 032c et dévoilé à ses followers son premier tatouage. Jusqu’ici, rien de nouveau. Sauf que Lil Miquela, malgré les apparences, n’est pas une personne en chair et en os : il s’agit d’un avatar généré par ordinateur.

Créée en 2016, elle comptabilise aujourd’hui 1,2 million d’abonnés. Une page Wikipedia lui est consacrée, elle donne des interviews, affiche son soutien à des causes telles que Black Lives Matter et a sorti des morceaux de R’n’B sur Spotify.

Robots plus vrais que nature

Première dans son genre, elle n’est plus toute seule sur Instagram : le mannequin homme Ronnie Blawko (@blawko22, 50 200 abonnés) ou la mannequin influenceuse Shudu Gram(@shudu.gram, 123 000 abonnés) l’ont rejointe. « Pour beaucoup de gens, étrangement, Shudu semble plus réelle que certains influenceurs qui utilisent une multitude de filtres et de maquillages pour créer de fausses réalités », indique Cameron-James Wilson, photographe britannique de 28 ans qui a créé Shudu Gram.

🍊🍊🍊 . . 📸@cjw.photo . #fenty #fentybeauty #mattemoiselle #sawc #3dart

Une publication partagée par Shudu Gram (@shudu.gram) le

Pour réaliser ces personnages, rien de très coûteux : « Il suffit de savoir manier un logiciel de modélisation 3D. J’ai utilisé Daz3D pour le personnage et le logiciel Clo3D pour dessiner les vêtements », poursuit-il.

Derrière Lil Miquela se cache une plus grosse machine : Brud, une société spécialisée en intelligence artificielle de Los Angeles (Californie), qui a aussi réalisé, en novembre 2017, son ami Blawko, un personnage moins lisse que la première.

« Elles ne vieillissent pas, ne tombent jamais malades et on peut les dupliquer à l’infini dans n’importe quel endroit du monde. » Julien Tauvel, cofondateur du studio de création Imprudence

Ces robots plus vrais que nature se révèlent lucratifs pour leurs créateurs : les marques, en effet, n’hésitent pas à faire appel à eux. Ainsi, Miquela était aux manettes du compte Prada lors de la Fashion Week de mars, elle est égérie de la marque de maquillage Pat McGrath (c’est désormais une #McGrathMuse au même titre que Naomi Campbell) et a collaboré avec Nike plus récemment. Elle tague de nombreuses griffes dans ses posts, de Proenza Schouler à Maison Margiela en passant par Off-White.

« Démocratisation des logiciels 3D »

« Ces créatures numériques possèdent des atouts imparables : elles ne vieillissent pas, ne tombent jamais malades et on peut les dupliquer à l’infini dans n’importe quel endroit du monde pour assister à tout type d’événements. Sans compter les économies que cela représente : aucun frais de shooting (ni photographe ni mannequin ni scénographe, etc.) n’est évidemment à prévoir », décrypte Julien Tauvel, cofondateur du studio de création et de prospective Imprudence. En 2016, Louis Vuitton se montrait précurseur en choisissant comme égérie une héroïne du jeu vidéo Final Fantasy.

Miquela Sousa a également enregistré des titres de R’n’B, ici avec l’avatar Ronnie Blawko (50 200 abonnés sur Instagram) et la chanteuse  bien réelle Wens. Miquela Sousa a également enregistré des titres de R’n’B, ici avec l’avatar Ronnie Blawko (50 200 abonnés sur Instagram) et la chanteuse  bien réelle Wens.

Avec l’émergence de ces influenceurs 2.0, la frontière entre le réel et le virtuel devient encore plus mince. Ils apparaissent à un moment où les méga-influenceurs, surnommés influenceurs « mammouths » (comprendre entre 500 000 et 1,5 million d’abonnés), sont en perte de vitesse. Selon un rapport de Launchmetrics (avril 2018), plate-forme spécialisée dans la mesure de l’impact des influenceurs, près de 46 % des grandes marques de mode, de luxe et de beauté disent préférer collaborer avec des micro-influenceurs (entre 10 000 et 100 000 followers), les méga-influenceurs attirant seulement 9 % des marques.

Manque de spontanéité, posts sponsorisés, poses artificielles : l’identification à ces modèles serait limitée. « La démocratisation des logiciels 3D est en cours ; à l’avenir, ils seront de plus en plus nombreux à être libres d’accès. Ces influenceurs virtuels ne sont-ils pas l’arbre qui cache la forêt ? Il faut se demander si, demain, nous, consommateurs, ne serons pas présents sur les réseaux sociaux sous la forme d’avatars que nous aurons imaginés ? La fusion entre le monde réel et le monde virtuel est consommée, il n’y a plus de retour en arrière possible », commente Julien Tauvel. Demain, tous des avatars ?

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