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Pourquoi le chemin du Canadien pour trouver son gardien d’avenir risque d’être long

ELMONT, NEW YORK - APRIL 12: Sam Montembeault #35 of the Montreal Canadiens skates against the New York Islanders at the UBS Arena on April 12, 2023 in Elmont, New York. (Photo by Bruce Bennett/Getty Images)
By Arpon Basu
May 11, 2023

Le Canadien a abordé son entre-saison avec l’espoir de combler plusieurs lacunes organisationnelles, et l’un de ses principaux objectifs est de trouver un futur gardien de but numéro un.

Ce n’est cependant pas une tâche facile. L’évaluation du talent d’un gardien demeure un objectif un peu énigmatique à atteindre pour les équipes de la LNH. La courbe de développement des gardiens est plus longue et les décisions les concernant doivent être prises alors qu’ils sont encore très jeunes, de sorte qu’il est encore plus difficile de prédire qui finira par se révéler comme un gardien titulaire dans la LNH.

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C’est le processus dans lequel le Canadien s’embarque, et pour mieux comprendre comment cette recherche d’un gardien d’avenir pourrait se dérouler, il vaut la peine de jeter un coup d’œil sur le passé et le présent.

Au repêchage de la LNH de 2021, les Red Wings de Detroit détenaient les sixième et 23e choix au premier tour et ils ont utilisé le premier pour repêcher le défenseur Simon Edvinsson. Or, le directeur général Steve Yzerman avait autre chose sur sa liste d’épicerie, et le choix n° 23 n’allait pas suffire à le lui donner. Il a donc combiné ce choix avec un choix de deuxième ronde et un autre de cinquième ronde pour grimper au 15e rang, où il a repêché le gardien Sebastian Cossa des Oil Kings d’Edmonton.

« C’est évident qu’en le choisissant à ce rang-là, on espère être allé chercher un gardien de but partant, et on pense qu’il a le talent pour le faire, a déclaré Yzerman ce jour-là. Il y a beaucoup de travail à faire entre aujourd’hui, entre le moment où il est repêché, et le moment où il deviendra un gardien numéro un dans la Ligue nationale, mais on pense qu’il en a les capacités. »

Cinq choix plus tard, le Wild du Minnesota a repêché le gardien Jesper Wallstedt au 20e rang, marquant la première fois que deux gardiens étaient sélectionnés en première ronde depuis 2012. Ce repêchage reflète bien à quel point il peut être difficile de trouver et de développer un gardien numéro un.

En 2012, c’est également Yzerman, alors directeur général du Lightning de Tampa Bay, qui avait utilisé le 19e choix pour sélectionner Andrei Vasilevskiy, qui a aujourd’hui deux bagues de la Coupe Stanley, un Conn Smythe et un trophée Vézina à son palmarès. Cinq choix plus tard, les Bruins de Boston avaient repêché Malcolm Subban, un gardien qui a joué 86 matchs dans la LNH depuis ce moment et qui vient de passer la saison dans la Ligue américaine avec les Americans de Rochester.

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À l’époque, le Lightning et les Bruins pensaient tous deux avoir mis la main sur un futur gardien titulaire, tout comme les Red Wings et le Wild croient encore l’avoir fait en 2021. Cossa a passé la majeure partie de la saison dans la ECHL, tandis que Wallstedt a connu une solide saison recrue dans la Ligue américaine. Ni l’un ni l’autre n’est près d’atteindre le point où l’on doit démissionner par rapport à eux, cela dit, car le développement d’un gardien prend du temps et demeure une science inexacte.

Pour les équipes en reconstruction, trouver un gardien qui sera non seulement assez bon pour devenir numéro un, mais qui sera également assez bon au bon moment, lorsque l’équipe elle-même sera rendue à maturité, est l’une des parties les plus difficiles du processus. C’est là où le Canadien se retrouve aujourd’hui, sans gardien de but d’avenir et avec l’intention d’en trouver un pendant l’entre-saison, que ce soit par le biais d’un repêchage ou d’un échange, ou peut-être même les deux à la fois.

Comment se déroulera ce processus pour le Canadien ? Nous avons jeté un coup d’œil à travers la ligue pour voir comment les autres équipes ont acquis leurs gardiens partant afin d’essayer de trouver un cheminement possible.

Pour les besoins de notre étude, nous avons fixé un seuil arbitraire de 45 matchs joués pour déterminer qui était un gardien numéro un dans la LNH cette saison, et il n’y avait que 21 gardiens sur la liste. Précisons que nous avons pris la liberté de remplacer Martin Jones, du Kraken de Seattle, par Philipp Grubauer, car ce dernier a manqué un mois d’activités en raison d’une blessure et il a montré en séries éliminatoires qu’il était incontestablement le gardien numéro un du Kraken.

Si le nombre de gardiens admissibles est si petit, c’est en partie parce que de plus en plus d’organisations fonctionnent désormais par tandem. Peut-être est-ce la voie de l’avenir, ou peut-être s’agit-il d’une évolution déclenchée par la difficulté de trouver un véritable gardien numéro un.

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Car les équipes qui possèdent un véritable numéro un utilisent rarement un véritable système d’alternance, même si ces gardiens titulaires jouent moins de matchs aujourd’hui qu’il y a une dizaine d’années.

Tout d’abord, voyons d’où proviennent ces 21 gardiens.

Il n’y avait que deux gardiens non repêchés sur notre liste, Sergei Bobrovsky et Alexandar Georgiev, de sorte que l’histoire de presque tous les gardiens numéro un de la LNH a commencé lors du repêchage. Mais nous y reviendrons.

Car la réalité, c’est que le repêchage n’est que le début d’un long voyage.

Comment les #1 ont été acquis
MéthodeNombre
Repêchage
11
Marché des joueurs autonomes
5
Échange
4
Joueurs autonomes européens
1

Comme vous pouvez le constater, sur les 19 gardiens qui sont arrivés dans la LNH par le biais du repêchage, seulement 11 sont encore avec l’équipe qui les a sélectionnés.

Les cinq gardiens qui ont signé en tant que joueurs autonomes sans compensation avec leur équipe actuelle coûtent en moyenne 6,43 millions $ par année contre le plafond salarial et, franchement, un seul d’entre eux, le gardien des Bruins et favori pour l’obtention du trophée Vézina Linus Ullmark, semble avoir un contrat rentable en ce moment (quoiqu’à ce moment précis, les Panthers ne se plaignent pas du faramineux contrat de 10 millions $ par année que traîne Bobrovsky).

Les quatre gardiens acquis par voie de transaction n’ont coûté à leur équipe que des choix au repêchage. Georgiev, par exemple, a joué 62 matchs pour l’Avalanche du Colorado cette saison et il ne lui a coûté que deux choix de troisième tour et un choix de cinquième tour. Vitek Vaněček a été acquis par les Devils du New Jersey dans le cadre d’un échange de choix, les Capitals de Washington ayant ajouté le 46e choix au repêchage de 2022 et ont obtenu les 37e et 70e choix des Devils. Vous voyez le topo.

Le problème avec les échanges de gardiens, c’est qu’ils se produisent rarement, car vous n’obtenez généralement pas la même valeur pour le gardien dont vous vous défaites.

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Les gardiens qui ont un impact peuvent également avoir été acquis par le biais du ballottage. Samuel Montembeault à Montréal et Anton Forsberg à Ottawa sont deux des quatre gardiens à avoir joué au moins cinq matchs dans la LNH la saison dernière et qui ont été cadeaux provenant du ballottage.

Mais aucune de ces voies ne mène généralement à l’obtention d’un gardien de but de premier plan. Non, la seule voie par laquelle les meilleurs gardiens sont acquis de nos jours, comme la plupart des autres joueurs de haut niveau, c’est par le repêchage. Mais la sélection des gardiens n’est pas un exercice simple.

Si l’on revient à notre liste de 21 gardiens numéro un de cette saison, et plus précisément aux 19 d’entre eux qui ont été repêchés, tous sauf deux ont été repêchés entre 2011 (John Gibson et Jordan Binnington) et 2017 (Jake Oettinger). Les deux exceptions sont Jacob Markström (2008) et Marc-André Fleury (2003).

Pour ces 19 gardiens repêchés qui étaient partants cette saison, il a fallu en moyenne un peu plus de six ans à partir du jour de leur repêchage pour devenir titulaires dans la LNH (c’est-à-dire qu’ils ont joué plus de 45 matchs dans une saison). Par conséquent, les gardiens repêchés en 2017 devraient, en théorie, avoir eu le temps de s’établir comme titulaires aujourd’hui.

C’est de cette façon que nous en sommes arrivés à cette fenêtre de 2011 à 2017 pour évaluer le parcours d’un gars depuis son repêchage jusqu’à sa titularisation comme numéro un dans la LNH.

Cela est pertinent pour le Canadien s’il espère repêcher son gardien d’avenir le mois prochain, parce qu’il y a de bonnes chances que si son choix s’avère judicieux, il faudra quand même au moins quatre ou cinq ans avant que ce gardien soit prêt. (Dans le tableau ci-dessous, nous avons ajusté la barre pour être un partant à 30 matchs – ou 55% des rencontres – pour la saison 2020-21 en raison du calendrier écourté de 56 matchs).

Temps requis pour devenir gardien #1
Gardien
  
Repêchage
  
Devenu #1
  
Années entre les deux
  
1er en 2003
2005
2
48e en 2016
2019
3
19e en 2012
2016
4
26e en 2017
2021
4
130e en 2012
2016
4
39e en 2011
2016
5
78e en 2017
2022
5
118e en 2014
2020
6
145e en 2015
2021
6
44e en 2013
2020
7
78e en 2014
2021
7
99e en 2013
2020
7
39e en 2014
2022
8
88e en 2011
2019
8
94e en 2014
2022
8
31e en 2008
2017
9
161e en 2009
2018
9
112e en 2010
2020
10
163e en 2012
2022
10

* Carter Hart a joué 43 matchs en 2019-20 lorsque la pandémie a frappé avec encore 13 matchs au calendrier des Flyers.

Même Vasilevskiy et Oettinger ont mis quatre ans à s’établir à partir de leur repêchage, et ils sont les deux seuls numéros un actuels à avoir été repêchés au premier tour (outre Fleury, bien sûr, qui est une anomalie d’une autre époque aux fins de cette analyse). L’ascension fulgurante de Hart vers le statut de numéro un à Philadelphie a peut-être été un peu trop rapide, puisqu’il a trébuché la saison suivante, mais il a bien rebondi aujourd’hui.

Il s’agit de trois exemples fructueux de hauts choix qui ont réussi une transition relativement rapide entre leur repêchage et un statut de gardien partant. Mais le taux de réussite pour des cas comme ceux-là n’est pas très élevé, et plus on avance dans le repêchage, plus ce taux diminue.

Quand les gardiens ont-ils été repêchés?
RondeTotalMoins de 5 PJMoins de 100 PJTaux de réussite
2
20
5
13
35%
3
31
13
24
22.6%
4
21
16
17
19.0%
5
18
15
15
16.7%
6
28
24
26
7.1%
7
24
19
23
4.1%

Nous avons considéré comme une réussite un gardien ayant joué plus de 100 matchs, ce qui n’est pas une mesure parfaite, mais nous devions fixer une limite quelque part. Ce qui illustre que ce n’est pas une mesure parfaite, c’est que les Bruins ont sélectionné Jeremy Swayman au quatrième tour en 2017 et il a joué 88 matchs dans la LNH, mais on peut dire sans risque de se tromper que Boston considère ce choix comme une réussite. Mais il s’agit somme toute d’une exception.

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En regardant le tableau, il devient assez clair que vous avez plus de chances de trouver un gardien titulaire dans les deux premiers tours du repêchage que plus tard, ce qui tombe sous le sens. Or, vos chances de trouver un gardien ne changent pas de façon radicale entre le troisième et le cinquième tour, et le troisième tour semble être celui où les équipes sont prêtes à dépenser le capital nécessaire pour tenter leur chance. Il y a 31 des 145 gardiens qui ont été repêchés dans cette ronde. Mais les quatrième et cinquième rondes ont également produit quelques-uns des meilleurs gardiens de la ligue.

Les Rangers de New York ont sélectionné Igor Shesterkin au quatrième tour en 2014, trois choix après que les Stars de Dallas eurent choisi Brent Moran et sept choix après que les Oilers d’Edmonton eurent choisi Zach Nagelvoort. Les Jets de Winnipeg, eux, ont choisi Connor Hellebuyck en cinquième ronde du repêchage de 2012 et Juuse Saros a été choisi au quatrième tour par les Predators de Nashville en 2013. Ça arrive.

Les équipes de la LNH aiment prendre des risques minimes en choisissant des gardiens aux sixième et septième tours en pensant qu’une grande quantité d’espoirs finira par produire de la qualité. Mais ça, ça n’arrive presque jamais.

En réalité, sur les 145 gardiens repêchés au cours de cette période, 119 d’entre eux, soit 82 %, n’ont jamais disputé plus de 100 matchs dans la LNH. On pourrait penser que repêcher en volume pourrait aider à atténuer ce déséquilibre statistique, mais ce n’est pas nécessairement le cas.

Les deux équipes de ce tableau qui ont repêché le plus de gardiens de 2011 à 2017 sont les Hurricanes de la Caroline et les Predators avec huit. Cela a fonctionné pour les Preds, qui ont trouvé Saros au quatrième tour en 2013. Mais les deux gardiens des Hurricanes qui participent actuellement aux séries éliminatoires, Frederik Andersen et Antti Raanta, ont été acquis en tant que joueurs autonomes en 2021. Ils comptent néanmoins sur Pyotr Kochetkov, qu’ils ont repêché en deuxième ronde en 2019 et qui a signé une prolongation de contrat de quatre ans en novembre. Cela a donc fini par fonctionner, mais Kochetkov était leur 10e gardien repêché depuis 2011 et les Hurricanes en ont repêché quatre autres depuis 2017.

Ce n’est pas surprenant que le Canadien se situe au bas de l’échelle de la ligue en termes de gardiens repêchés, avec seulement trois gardiens de 2011 à 2017, ce qui correspond essentiellement aux années de gloire de Carey Price. Depuis 2017, le Tricolore a repêché quatre gardiens, mais aucun n’a été réclamé avant la cinquième ronde.

Alors, que faut-il en conclure ? Que l’obtention d’un gardien de but partant n’est pas une mince affaire ? Peut-être, mais aussi qu’il y a un chemin à suivre.

Après avoir repêché Cossa, Yzerman a acquis les droits de signature de Ville Husso des Blues de St-Louis en échange d’un choix de troisième tour, puis il lui a fait signer une entente de trois ans pour 4,75 millions $ par année. Lorsque le contrat de Husso expirera, cela fera quatre ans qu’il a repêché Cossa et il devra espérer que le gardien qu’il a recruté en 2021 sera prêt à prendre la relève.

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Si le Canadien utilise son choix en fin de première ronde ou en début de deuxième ronde pour réclamer un gardien, il aura besoin d’un plan de transition similaire. Car, comme nous l’avons vu plus haut, même si la courbe de développement se déroule de la meilleure façon possible, le mieux que le CH puisse raisonnablement espérer, c’est que ce gardien soit prêt dans quatre ans. Montembeault représente peut-être ce plan de transition, car il semble s’affirmer comme un gardien de la LNH, et Jake Allen est sous contrat pour deux ans de plus afin de l’épauler. Une autre façon d’accélérer la courbe de développement serait de mettre la main sur un gardien qui a déjà été repêché, un peu à l’image de l’acquisition du centre Kirby Dach ou de ce que les Sabres de Buffalo ont fait pour obtenir Devon Levi. Mais dans les deux cas, le coût d’acquisition a été assez élevé.

De plus, étant donné que les chances qu’un gardien repêché au deuxième tour atteigne la ligne d’arrivée du développement ne sont que de 35 %, un plan d’urgence devra être mis en place au cas où le plan A ne fonctionnerait pas.

Car il sera impossible pour le Canadien de savoir s’il a repêché le prochain Andrei Vasilevskiy ou le prochain Malcolm Subban.

(Photo de Samuel Montembeault: Bruce Bennett/Getty Images)

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Arpon BasuArpon Basu

Arpon Basu est rédacteur en chef d’Athlétique Montréal et The Athletic Montreal. Il a travaillé pendant six ans pour la LNH comme directeur de la rédaction de LNH.com et comme collaborateur avec NHL.com. Il couvre le sport, particulièrement le hockey, à Montréal depuis 2000. Follow Arpon on Twitter @ArponBasu