[go: up one dir, main page]

Pourquoi le cinquième choix au repêchage est un casse-tête pour le Canadien

MONTREAL, QUEBEC - JULY 07: (L-R) Jeff Gorton and Kent Hughes of the Montreal Canadiens confer during Round One of the 2022 Upper Deck NHL Draft at Bell Centre on July 07, 2022 in Montreal, Quebec, Canada. (Photo by Bruce Bennett/Getty Images)
By Marc Antoine Godin
May 9, 2023

C’est la force des cinq meilleurs espoirs de cette année qui fait du repêchage 2023 une cuvée aussi prometteuse, encore plus que la profondeur du talent disponible plus tard en première ronde. Au-delà de Connor Bedard, qui fera le délice des partisans à Chicago, les attaquants Adam Fantilli, Leo Carlsson, Will Smith et Matvei Michkov ont tous le potentiel de devenir le meilleur joueur de leur équipe, et peut-être des joueurs de concession s’ils vont au bout de leur potentiel.

Advertisement

Il semble y avoir aux yeux de la majorité des observateurs une démarcation très nette entre ces cinq joueurs et le reste de la cohorte. En temps normal, l’équipe qui repêche cinquième aurait donc le travail le plus facile, celui de repêcher l’espoir qui est encore disponible au sein de ce quintette.

Mais le cas Michkov apporte une telle zone d’ombre que le Canadien, qui a hérité du cinquième choix au total à l’occasion du tirage au sort, lundi soir, se retrouve possiblement dans la situation la plus délicate, et non la plus facile.

Michkov est perçu comme le meilleur espoir russe au moment du repêchage depuis qu’Alexander Ovechkin et Evgeni Malkin ont été les deux premiers joueurs choisis en 2004. Il a été nommé à l’âge de 16 ans le joueur par excellence du Championnat mondial U18, un tournoi en grande partie réservé aux espoirs de 17 ans. Il venait auparavant de récolter le plus grand nombre de points par un joueur de 16 ans dans l’histoire de la MHL, le circuit junior russe.

Et cette année, après que le SKA Saint-Pétersbourg l’eut prêté à la formation de Sotchi au mois de décembre, il a joué près de 16 minutes en moyenne et a obtenu 20 points en 27 matchs, ce qui lui a permis d’obtenir la meilleure moyenne de points par match par un joueur disputant sa saison de 17 ans depuis la création de la KHL en 2008.

Michkov a un talent de marqueur indéniable et il pourrait remplir le filet pour le Canadien. Dans le meilleur des mondes, ce serait l’équivalent de greffer un Nikita Kucherov à sa formation.

En revanche, Michkov est sous contrat en Russie jusqu’au terme de la saison 2025-26, si bien qu’en le sélectionnant, le Canadien ne le verrait pas arriver avant l’âge de 21 ans, et après avoir été forcé de faire confiance au SKA pendant trois ans pour qu’il gère correctement le développement de Michkov.

Advertisement

Et c’est sans compter que les tensions géopolitiques découlant de la guerre en Ukraine pourraient empêcher le Tricolore d’assurer un suivi serré de son meilleur espoir, et que rien ne garantit que Michkov sera libre de quitter la Russie une fois son contrat arrivé à échéance.

Ajoutez à cela le fait que le père de Michkov a été retrouvé mort dans un étang, le mois dernier, dans des circonstances encore nébuleuses, et vous commencez à avoir plusieurs éléments d’une intrigue dans laquelle une équipe de la LNH n’a pas nécessairement envie de jouer un rôle.

Matvei Michkov (Maksim Konstantinov/SOPA Images/LightRocket via Getty Images)

Mais même s’il est beaucoup question du fait que Michkov ne pourrait pas venir jouer dans la Ligue nationale avant la saison 2026-27, une équipe ne peut pas laisser ce facteur influencer indûment sa décision. Le Canadien est à la recherche d’accélérateurs de manière à ne pas vivre une trop longue reconstruction, mais l’histoire du contrat ne devrait pas avoir préséance sur d’autres critères. L’important n’est pas la vitesse avec laquelle un espoir peut venir aider son équipe de la LNH, c’est de savoir qui sera le meilleur joueur quand ces jeunes hommes seront arrivés à maturité.

En 2016, l’attaquant finlandais Jesse Puljujärvi était perçu comme un choix top-3 assuré en vue du repêchage. Puljujärvi était un jeune homme gêné qui ne maîtrisait pas l’anglais, mais le DG des Blue Jackets de Columbus, Jarmo Kekäläinen, est lui-même Finlandais et il avait pu profiter d’un contact privilégié avec Puljujärvi pour faire plus ample connaissance. En fin de compte, pour des motifs qui n’ont jamais été rendu publics, les Blue Jackets ont choisi d’ignorer ce qui semblait être un choix consensuel et ont jeté leur dévolu sur Pierre-Luc Dubois.

Kekäläinen s’était peut-être aperçu de quelque chose qui avait échappé aux autres, et il a eu raison.

Advertisement

Pourquoi vous rappeler cette histoire? Parce que Nik Bobrov, le co-directeur du recrutement amateur du Canadien, est d’origine russe, et il est le seul Russe à occuper ce statut à l’échelle de la Ligue nationale. Son passeport lui a donné la possibilité cette année de voir davantage les joueurs russes en action que ses homologues des autres équipes. Difficile de dire dans quelle mesure il a pu en profiter, mais il est permis de croire que Bobrov est en position d’obtenir un portrait plus détaillé de Michkov et ainsi, soit justifier sa sélection, soit recommander à ses supérieurs de passer outre comme l’avait fait Kekäläinen avec Puljujärvi.

« C’est sûr que ça nous fait plus peur qu’un autre prospect à cause de raisons évidentes, mais je ne peux pas vous dire aujourd’hui, a indiqué le directeur général Kent Hughes lors de la visioconférence qui a suivi le tirage au sort.

« Si l’on détermine que Michkov est beaucoup plus talentueux que les autres joueurs disponibles rendu au repêchage, on va avoir une décision à prendre. Pour le moment, on a beaucoup de travail à faire sur son dossier, premièrement comme joueur mais aussi par rapport aux risques qui vont venir avec lui. »

À nos yeux, les irritants constamment cités au sujet de Michkov sont un peu l’arbre qui cache la forêt. En bout de ligne, il faut que ce soit des raisons purement liées au hockey qui guident le choix du Canadien. Ces raisons le mèneront peut-être à la conclusion que Michkov est incontournable. Après tout, ses exploits offensifs parlent d’eux-mêmes. Mais sinon, le Canadien devra démontrer que cette démarcation entre les cinq premiers espoirs et les autres dont on fait état dans la sphère publique n’est pas si réelle.

Les équipes qui repêcheront devant le Canadien pourraient toutes trouver des raisons justifiables de choisir Carlsson ou Smith plutôt que Michkov. Ce serait beaucoup plus audacieux de la part du Canadien d’aller dans une autre direction, car y renoncer serait susceptible de lui sauter en plein visage par la suite.

On trouve quand même plusieurs espoirs dans la gamme suivante susceptibles de donner un bon coup de main au Canadien, même s’ils ne sont pas tous précédés de la même fanfare que Michkov.

Il pourrait s’agir de Ryan Leonard, la bougie d’allumage du Programme de développement des États-Unis, qui serait le parfait complément à Nick Suzuki et Cole Caufield sur le premier trio.

Advertisement

Il pourrait s’agir de Dalibor Dvorský, un centre slovaque qui a connu un excellent Mondial U18, ou encore du défenseur autrichien David Reinbacher, qui a été une révélation dans la Ligue nationale de Suisse cette année.

Sans compter Zach Benson qui a son lot de supporters en raison de son jeu électrisant.

Hughes a indiqué qu’il lui paraissait peu probable qu’il échange le cinquième choix, sans bien sûr fermer la porte à cette possibilité. Permettez qu’on soulève ici une hypothèse.

Si jamais le Canadien détermine que Michkov n’en vaut pas le souci, et qu’aucun joueur parmi ceux que nous avons cités n’a de véritable longueur d’avance sur les autres, il devrait peut-être considérer troquer son cinquième choix et reculer de quelques rangs afin de mettre la main sur un atout supplémentaire.

En 2008, les Islanders de New York avaient accepté d’inverser leur cinquième choix avec le septième des Maple Leafs de Toronto, et avaient obtenu en dédommagement un choix de troisième ronde la même année ainsi qu’un choix de deuxième ronde l’année suivante. Pour le CH, ce serait une façon de monnayer autrement la place que le tirage au sort lui a donné.

Mais toutes ces élucubrations partent de la prémisse que les Blue Jackets et les Sharks de San Jose, en particulier, vont eux-mêmes ignorer Michkov. On ne peut pas le tenir pour acquis.

« C’est sûr que si l’on a la chance de choisir cinquième plutôt que sixième ou septième, on aime beaucoup mieux choisir cinquième parce qu’on ne sait pas ce que les autres vont faire en avant de nous », a convenu Hughes. Autrement dit, à ce rang-là, il n’est pas impossible qu’une autre équipe règle son dilemme à sa place.

Si Carlsson ou Smith atterrissaient dans sa cour, ce serait en effet plus simple.

Mais autrement, le cinquième rang risque d’être la position la plus difficile de ce repêchage.

(Photo: Bruce Bennett/Getty Images)

Get all-access to exclusive stories.

Subscribe to The Athletic for in-depth coverage of your favorite players, teams, leagues and clubs. Try a week on us.