[go: up one dir, main page]

Sauvetage et découverteRochet-Schneider 420 TA de 1943

Fabriqué à Lyon, ce Rochet-Schneider 420 TA constitue une perle rare. A son volant, nous retrouvons Francis Billat qui a fait revivre ce tracteur de famille.
Fabriqué à Lyon, ce Rochet-Schneider 420 TA constitue une perle rare. A son volant, nous retrouvons Francis Billat qui a fait revivre ce tracteur de famille.

Spécialisée dans l'automobile et les camions, la firme lyonnaise Rochet-Schneider s'est également investie dans l'étude et la fabrication de tracteurs agricoles. C'est dans le Lot-et-Garonne que Tracteur Rétro a rencontré un Rochet-Schneider, de type 420 TA, amoureusement conservé depuis trois générations par la famille Billat. Une rencontre s'imposait.... Texte : Claude Brard / Jean-Pierre Marsonetto - Photos : Claude Brard - Archives : Francis Billat / Guillaume Waegemacker

Plutôt méconnue, l'activité de constructeur de tracteurs agricoles de la firme Rochet-Schneider nous permet d'ouvrir le chapitre des perles rares. Elaboré et commercialisé au cours de la Seconde Guerre mondiale, le tracteur Rochet-Schneider 420 TA est muni d'un gazogène, contexte oblige. Son moteur est un quatre cylindres de 5320 cm3. Sa puissance réelle atteint 40 ch à 1400 tours/minute. La boîte de vitesses compte cinq rapports avant et une marche arrière.

Fondée en 1892, la firme Rochet-Schneider résulte de l'association d'Edouard Rochet et de Théodore Schneider. La partie supérieure du radiateur rappelle les noms des deux créateurs de la marque. 

Elaboré par Facel, le gazogène utilisé sur ce modèle est de type 505 D. Il se compose de quatre éléments principaux : le générateur, le refroidisseur, l'épurateur et le mélangeur. Le générateur est accompagné d'un cyclone dépoussiéreur alors que le refroidisseur reçoit un pot de condensation. Bien peu d'éléments historiques sont parvenus jusqu'à nous sur ces modèles. Francis Billat, l'un des conservateurs du tracteur que nous avons photographié a effectué quelques recherches historiques sur ce modèle : « Le 420 TA a été produit à une centaine d'exemplaires. A ce jour, j'en ai recensé une dizaine. » Il semblerait que Rochet-Schneider prévoyait, une fois la guerre terminée, de commercialiser à nouveau le 420 TA, mais sans gazogène. Ce projet ne semble pas avoir eu de suite. 

Publicité pour le tracteur 420 TA. Le dispositif à gazogène y est présenté comme révolutionnaire.

 

Focus sur le côté gauche du moteur. La culasse est en fonte d'acier, tout comme le cache-culbuteurs qui est estampillé Rochet-Schneider. En sortie à l'arrière de la dynamo, un axe entraîne la pompe à eau.

Vue moteur côté droit. Le collecteur d'échappement est en acier coulé, alors que le collecteur d'admission fait appel à l'aluminium. Le carburateur a été remplacé lorsque le tracteur a fonctionné exclusivement à l'essence.

Une carrière dans une seule région

 C'est au cours de nos pérégrinations dans le Lot-et-Garonne que nous avons eu la chance d'approcher cet exemplaire datant de 1943. Ce tracteur a été livré neuf à un Canadien qui possédait une propriété dans la vallée de la Garonne. Par la suite, le 420 TA a rejoint le parc de matériels d'un entrepreneur agricole voisin. Celui-ci l'utilise alors essentiellement en poste fixe pour l'entraînement d'un ensemble de battage. Alors que la guerre touche à sa fin, cet entrepreneur décide de supprimer le gazogène pour faire fonctionner le 420 TA exclusivement à l'essence. Il n'arrive pas à le mettre au point et décide alors de s'en séparer. Son nouvel acquéreur n'est autre que le grand-père de Francis Billat. La mise au point du tracteur est effectuée par un voisin mécanicien ayant œuvré à maintes reprises sur les camions Rochet-Schneider durant la seconde guerre mondiale. Il procède à  un changement de pistons et une modification du taux de compression. Le résultat est immédiat. Le tracteur est aussitôt mis en service sur deux exploitations de 50 hectares appartenant à la famille Billat. Il sert principalement au labour, travaillant de concert avec une charrue McCormick bisoc traînée de 12 pouces.

Ce réservoir de carburant des plus rudimentaires est disposé sur le côté gauche du tracteur. A cet endroit prenait place une partie de l'équipement gazogène du tracteur.

A l'occasion, le Rochet-Schneider est prêté à quelques agriculteurs voisins. Dans le cadre du développement de leurs exploitations, les Billat font l'acquisition d'un Renault D35. Le Rochet-Schneider prend alors la place de second sur l’exploitation et participe au ramassage des récoltes. Francis Billat, qui était alors âgé d'une dizaine d'années à l'époque, se souvient : « Alors que j'étais haut comme trois pommes, j'étais chargé de conduire le Rochet-Schneider lors du ramassage des balles de foin. Mes jambes étant trop courtes pour atteindre la pédale d'embrayage, la première vitesse restait donc engagée. Pour avancer, il me suffisait de mettre le contact et d'appuyer sur le bouton du démarreur. Pour stopper l'avancement du tracteur, je n'avais qu'à couper le contact ! »

Petit coup d'œil  sur la planche de bord.  A gauche, le conducteur trouve les cadrans de l'ampèremètre et du manomètre de pression d'huile. Entre ces deux cadrans se trouve le bouton de mise en marche. A droite, sur la rangée supérieure, se trouve la tirette commandant la fermeture de la tubulure du carburateur. Lorsque le tracteur disposait encore de son équipement gazogène, celle-ci ouvrait également l'arrivée des gaz au mélangeur. Les deux tirettes de la seconde rangée sont celles du starter (à gauche) et celle de l'éclairage. L'emplacement du cadran de droite était celui du manomètre de dépression des gaz. Il domine sur une petite plaque en aluminium rappelant le schéma de la grille de vitesses.

La poulie de battage du tracteur a été démontée par sécurité. Nous percevons ici le renvoi d'angle de cette dernière. En bout du renvoi se situe l'arbre de prise de force.

47 ans de remisage....

En 1967, le Rochet-Schneider est remisé au fond d'une bâtisse pour en ressortir... 47 ans plus tard ! « C'est l'organisation d'une fête liée au patrimoine agricole ancien au sein de notre village qui m'a décidé à dépoussiérer et à remettre en marche ce tracteur de famille. Cette grosse révision a mobilisé tous mes loisirs en l'espace de quelques semaines », commente Francis. Pieusement conservé au titre de patrimoine familial, le Rochet-Schneider 420 TA participe désormais régulièrement à différentes festivités liées au monde agricole. A ce jour, Francis Billat est indécis. Doit-il le laisser dans cet état ou le restaurer intégralement ? Sans prétention aucune, cette seconde alternative n'a d'intérêt que si le tracteur est remis dans sa configuration d'origine, c'est à dire avec un gazogène Facel de type 505 D. Retrouver un tel équipement n'aura rien d'évident et mènera Francis sur une enquête digne de Sherlock Holmes. C'est aussi le charme d'une telle démarche. A terme, Francis aurait alors la satisfaction d'avoir redonné un nouveau souffle à cette pièce historique. 

Après avoir été plongé dans un profond sommeil pendant quasiment un demi-siècle, le 420 TA est reparti pour de nouvelles aventures. Le tracteur entraîne ici une charrue balance.

 

Facel, un grand nom du gazogène 

Durant la Seconde Guerre mondiale, la majeure partie du carburant est réservée à l'occupant. Pouvant s'adapter sur des automobiles, des autocars, des camions ou des tracteurs agricoles, les gazogènes permettent aux français de poursuivre leurs activités et de se véhiculer. Dans l'Hexagone, le pionnier de ce dispositif se nomme Georges Imbert. Au cours de la seconde guerre mondiale, la France dénombre une centaine de constructeurs. Le principe du gazogène ? Par combustion contrôlée de charbon ou de briquettes de bois, il génère un mélange de gaz combustibles tel le monoxyde de carbone, le méthane et l'hydrogène. Une fois épuré, le gaz peut alimenter un moteur à explosion prévu initialement pour fonctionner à l'essence. Offrant un rendement des plus moyens, le gazogène aura eu le mérite de poursuivre l'aventure de la locomotion en cette période difficile. Après avoir acquis une licence auprès de BBK, la société Facel (Forges et Ateliers de Constructions d'Eure-et-Loir) dont le siège social se situe à Dreux, s'investit dans la fabrication de gazogènes début 1941. Sur un feuillet publicitaire consacré à ses gazogènes à bois, le constructeur vante les mérites du modèle 505, équipant à l'origine le 420 TA : « Un modèle spécial dans les séries des « types 505 » a été mis au point pour répondre d'une façon parfaite aux différentes puissances et caractéristiques des tracteurs agricoles actuellement en service. » Au total, 10 000 gazogènes auraient été produits par Facel. Le 6 août 1945, Facel devient la Compagnie Facel-Metallon. Présidée par Jean-Clément Daninos, cette entreprise se spécialise dans la construction de carrosseries pour Delahaye, Ford SAF, Panhard, Simca... C'est notamment chez Facel-Metallon que seront emboutis les capots des Ferguson fabriqués en France à Saint-Denis par la Standard Hotchkiss. 
Facel a aussi fabriqué des automobiles haut de gamme entre 1954 et 1964. Des problèmes de fiabilité sur les moteurs de certains modèles vont conduire à la disparition de la marque, mise en liquidation en 1962 et dont l'usine installée à Colombes fermera définitivement ses portes en 1964.

Réagir à cet article

Les dernières annonces de matériel agricole d'occasion

Sur le même sujet

Manitou, première partie

1944-1959 : vers le chariot élévateur idéal

Renault 90-34 TX Tracfor, 1994

X Tractor

HSCS Le Robuste K50

L'Hercule de Budapest

Tracteurs

Landini célèbre 140 ans d’existence

McCormick D-219 de 1962

« Germanische Qualität »

Vendeuvre BL 335

Orange Mécanique !

Someca 1300 1973 N° de série 925001

The first one !