"La mer a tout mangé" : la Guadeloupe, département français le plus touché par l'érosion des côtes

Selon la dernière étude du Cerema, d'ici 2050 plus de 5 000 logements deviendront inhabitables du fait de l'érosion naturelle et la montée du niveau de la mer. L'archipel des Antilles concentre à lui seul plus de 10% de ces logements menacés.
Article rédigé par Boris Loumagne
Radio France
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Temps de lecture : 3 min
Une maison de Petit-Bourg, en Guadeloupe, au bord de la falaise. Avril 2024 (BORIS LOUMAGNE / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

 "L'équivalent d'un terrain de football disparaît chaque semaine dans notre pays sous l'effet de la progression des océans". C'est l'alerte lancée au début du mois par le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu. Ce phénomène risque encore de s'amplifier dans les années à venir. Selon la dernière étude du Centre d'études et d'expertises sur les risques, la mobilité et l'aménagement (Cerema), d'ici 2050 plus de 5 000 logements deviendraient inhabitables.

En cause : l'érosion naturelle et la montée du niveau de la mer causée par le réchauffement climatique. Le département le plus touché, c'est la Guadeloupe. L'archipel des Antilles concentre à lui seul plus de 10% des logements menacés et plusieurs communes sont d'ores et déjà concernées. À Petit-Bourg, par exemple, face à l'avancée de la mer, une trentaine de familles ont déjà dû être relogées.

La plage a disparu

Pour observer au mieux l'érosion des falaises de la commune de Petit-Bourg, il faut prendre la mer. L'eau est marron ici, et on comprend vite pourquoi. Les falaises couleur ocre d'une dizaine de mètres de hauteur, s'effritent quasiment de jour en jour. Diego est moniteur à la base nautique, c'est surtout un enfant du pays. "Tout ça, ça s'est effondré, et ça empire. Avant on marchait partout ici", dit-il en observant le paysage. En 20 ans, la plage a effectivement disparu, remplacée par un amas de terre, d'arbres morts et de blocs de béton. "La mer a tout mangé. En dessous, on voit une maison qui est tombée", décrit-il.

Plusieurs maisons ont en effet été emportées par les éboulements, d'autres sont comme en équilibre au bord de la falaise. Vania, 68 ans, habite une de ces maisons face à la mer "depuis l'âge de 17 ans". La falaise n'a jamais été aussi proche de sa maison, à une quinzaine de mètres. Elle doit donc quitter les lieux.

"Je n'ai pas envie de partir. Si j'avais pu rester là, je serais restée. C'est toute ma vie, toute ma jeunesse, tous les enfants voulaient rester."

Vania, une habitante de Petit-Bourg

à franceinfo

Retrouver sécurité physique et juridique

Vania le concède à demi-mot, elle finira bien par partir, comme la trentaine de familles déjà relogées ailleurs, dans des lotissements de la commune. "Personne ne quitte son domicile de gaieté de cœur", a bien conscience Rony Saint-Charles, directeur de l'agence des 50 pas géométriques.

Avec son équipe il est en charge de la régularisation foncière des habitants relogés, car il faut comprendre que toutes ces maisons ont été construites il y a 50 voire 100 ans, sans autorisation, sur des terrains appartenant à l'Etat. "Les personnes ne sont pas propriétaires, donc on ne peut pas les exproprier, elles n'ont pas de titre, explique-t-il. Désormais, le principe c'est qu'elles puissent être relogées ailleurs en devenant propriétaire, en ayant un titre. On peut dire qu'elles ont deux sécurités. Une sécurité physique par rapport au risque naturel et une sécurité juridique par rapport au fait qu'elles sont désormais propriétaires de leur domicile", plaide-t-il.

Dialoguer et proposer des solutions concrètes aux habitants : ce modèle développé à Petit-Bourg va être dupliqué dans une vingtaine d'autres communes de Guadeloupe menacées, elles aussi, par la montée des eaux.

La Guadeloupe victime de l'érosion des côtes : reportage de Boris Loumagne

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