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Procès du meurtre d'Adrien Perez : les dysfonctionnements du Phoenix

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La première semaine du procès des meurtriers présumés d'Adrien Perez se termine. La cour a entendu le gérant de la discothèque, devant laquelle s'est déroulé le drame. Des dysfonctionnements ont été pointés. Le responsable a tenté de se justifier, tout en formulant des regrets.

La discothèque est fermée depuis fin octobre à cause du Covid La discothèque est fermée depuis fin octobre à cause du Covid
La discothèque est fermée depuis fin octobre à cause du Covid © Radio France - Véronique Pueyo

La première semaine du procès des meurtriers présumés d'Adrien Perez, les frères El Habib, poursuivis pour meurtre, tentative et violences aggravées et de Liam Djadouri, poursuivi pour violences aggravées, s'est achevée hier soir.

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Le gérant du Phoenix mis en difficulté

La cour a entendu le gérant du Phoenix, la boite de nuit de Meylan à proximité de laquelle s'est déroulé le drame, ce 29 juillet 2018. Autant dire que le responsable a été mis sur le grill. La présidente a demandé au gérant du Phoenix de s'expliquer sur les dysfonctionnements qu'il y a eu cette nuit-là. D'abord, les frères El Habib n'ont pas été passés au détecteur de métaux. Younès El Habib a pu rentrer, en portant un couteau sur lui, un Opinel. 

Le banc des parties civiles
Le banc des parties civiles © Radio France - Véronique Pueyo

Ensuite, après l'altercation entre Yanis El Habib et Thibault Joffre, dans le sas de l'établissement, les videurs n'ont attendu qu'une minute et onze secondes après le départ du groupe d'Adrien pour laisser sortir à leur tour les accusés. L'agent de sécurité qui était dans le sas, à ce moment-là, a reconnu hier qu'il avait manqué de perspicacité. A la question d'un avocat de la partie civile : "Pensez-vous avoir commis une faute professionnelle ? " L'homme, embarrassé, a préféré ne pas répondre.

Et enfin, le maitre-chien qui gère la sécurité à l'extérieur de l'établissement était sur une autre intervention quand la bagarre a commencé. Il n'a donc pas pu s'interposer.

"En 35 ans de métier, c'est la première fois qu'une chose pareille arrive" - Le gérant du Phoenix

"Je ne peux pas être derrière chaque employé" se défend le responsable du Phoenix qui dit regretter fortement ces dysfonctionnements. "Je suis papa et je connais l'oncle paternel d'Adrien. C'est dramatique. En 35 ans de métier, c'est la première fois qu'une chose pareille arrive". souligne-t-il. "Pensez vous avoir une responsabilité morale dans le drame ?" lui demande un avocat de la partie civile. Là encore, l'homme fait la moue, mais garde le silence.

Les frères El Habib, des clients privilégiés ?

L'avocat général lit alors une lettre anonyme, envoyée au juge d'instruction, affirmant que les frères El Habib étaient des habitués à qui la discothèque accordait des faveurs. "C'est faux" s'indigne le directeur. "Chez nous, on est clean, les gangsters, on les laisse à la porte." "Mais alors", insiste le magistrat, "Yanis El Habib, dont vous avez dit lors de l'enquête qu'il avait mauvaise presse, que faisait-il chez vous?"

Jacques Dallest, le procureur général
Jacques Dallest, le procureur général © Radio France - Véronique Pueyo

L'alcool en cause

Maitre Ripert, l'avocat de Liam Djadouri, que l'on a presque oublié, affalé sur sa chaise, car il comparait libre, prend la parole. "_C'est une faute de continuer à vendre de l'alcool à des jeunes déjà en état d'ivresse__. Ils ont dépensé pour 600 euros de bouteilles chez vous. 600 euros qui ont conduit à la mort d'une homme."_ déplore l'avocat.

Tout a été filmé

C'est plutôt rare d'assister à un procès où tout a été filmé. Mercredi, on a donc pu voir la mort en direct d'Adrien Perez, tué d'un coup de couteau en plein cœur. Younès El Habib dit que c'est lui, mais le dernier à l'avoir frappé c'est Yanis el Habib, qui affirme ne pas avoir tenu de couteau. C'est tout l'enjeu de ce procès.

Et hier, la cour a visionné les images tournées par la Go Pro que le médiateur du Phoenix portait sur lui. La qualité de l'image est bien meilleure que celle des caméras de vidéosurveillance et surtout il y a le son. On voit, on entend Adrien Perez arriver à la discothèque, tout sourire avec ses amis. Il ne sait pas qu'il vit ses derniers instants.

Les parents d'Adrien Perez avec leur avocat, Maitre Dreyfus
Les parents d'Adrien Perez avec leur avocat, Maitre Dreyfus © Radio France - Véronique Pueyo

Après la rixe mortelle

Ensuite, on distingue Adrien allongé au sol, contre le mur du cimetière. Le médiateur, qui filme tout avec sa GoPro, demande à ses amis de le mettre en PLS, puis un témoin lui fait un massage cardiaque. Le gérant de la discothèque est là, avec les videurs et ils comprennent que si Mathieu Porte peut s'en sortir, pour Adrien, c'est fini.

Ses amis, tenus à distance, n'ont pas réalisé que l'irréparable a été commis. Le Samu arrive, les médecins entourent le corps d'Adrien. Ils savent que le jeune homme de 26 ans est mort mais ils continuent à faire semblant de le ranimer, en attendant que la tension retombe.

Omerta

Dans les conversations, tous parlent du garçon aux cheveux longs, décolorés, tenus en queue de cheval, avec un t-shirt brillant. Il y en a un qui dit : "C'est l'équipe à Yanis ?"

Le médiateur lui-même croise Yanis El Habib qui vient de quitter la scène de crime. Il lui dit, énervé : "Je les ai couchés, ces fils de pute, qui m'ont étranglé, comme une pute." Le médiateur lui conseille de partir. "Je ne savais pas ce qui s'était passé" explique-t-il à la cour. "Je ne voulais pas qu'il reste pour ne pas envenimer la situation." Un autre témoin explique qu'il ne dira rien, par peur des représailles. "Si ca sort de ma bouche, ma famille est foutue"

La gendarmerie de Grenoble, sous le commandement du Colonel Marzin, enquête après le meurtre d’Adrien Pérez, à la sortie d'une boite de nuit, à Meylan, en Juillet 2018
La gendarmerie de Grenoble, sous le commandement du Colonel Marzin, enquête après le meurtre d’Adrien Pérez, à la sortie d'une boite de nuit, à Meylan, en Juillet 2018 © Radio France - Véronique Pueyo

Au fil des minutes qui s'égrènent, on voit le jour se lever. Les gendarmes arrivent et interrogent les témoins. Mais personne ne leur donnera le nom des agresseurs, alors que tout le monde, y compris le personnel du Phoenix, connait leur identité. Ils vont devoir mener l'enquête pour identifier les El Habib. Younès se rendra deux jours plus tard, après avoir pris soin d'appeler la police pour dire qu'il avait besoin de ce temps pour dire au revoir à sa famille. 

Une plaque en mémoire d'Adrien

Le Phoenix, fermé six mois sur décision du préfet de l'Isère, après le drame, a dû refermer ses portes à cause du Covid, fin octobre 2020, et n'a toujours pas rouvert. A l'endroit où Adrien Perez est tombé, ses parents ont fait apposer une plaque, en mémoire de leur fils, sur le mur du cimetière. Une main anonyme y glisse parfois une fleur.

Patricia, Bruno et Marjorie Perez, la sœur d'Adrien, en mai 2019, lors du dévoilement de la plaque, apposée à l'endroit où Adrien est mort.
Patricia, Bruno et Marjorie Perez, la sœur d'Adrien, en mai 2019, lors du dévoilement de la plaque, apposée à l'endroit où Adrien est mort. © Radio France - Véronique Pueyo

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