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Mobilité : avec 2h37 de transports quotidiens en moyenne, les jeunes ruraux "assignés à résidence", souligne une étude

Culture, études, emploi, santé, les jeunes ruraux doivent régulièrement renoncer à des opportunités à cause des difficultés de mobilité auxquelles ils sont confrontés, note ce jeudi une étude de l'Institut Terram et Chemins d'avenir avec l'Ifop. Une forme "d’assignation à résidence".

Plus d'un jeune rural sur deux déclare être mal desservi par une ligne de bus. Plus d'un jeune rural sur deux déclare être mal desservi par une ligne de bus.
Plus d'un jeune rural sur deux déclare être mal desservi par une ligne de bus. © Getty - Saulgranda

Une étude publiée ce jeudi et que France Bleu a pu se procurer met en lumière les difficultés rencontrées par la jeunesse rurale à cause des problématiques de mobilité. "Les jeunes ruraux se heurtent à une forme d’assignation à résidence", note cette étude menée par l'Institut Terram et Chemins d'avenir avec l'Ifop et intitulée "Jeunesse et mobilité, la fracture rurale".

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Pour ces jeunes ruraux (jeunes de 18 ans et plus issus de communes "peu" voire "très peu denses"), "l'enjeu est avant tout de pouvoir bouger", soulignent les auteurs de l'étude. "Les kilomètres sont lourds de conséquences" sur leur quotidien. Ainsi les jeunes ruraux passent-ils en moyenne 2h37 dans les transports chaque jour, contre 1h55 pour les jeunes urbains. Cela représente "près de trois quarts d’heure en moins" chaque jour à consacrer aux "loisirs culturels", à "la pratique sportive ou encore le temps en famille". De même, le budget moyen pour les transports d’un jeune rural s’élève à 529 euros par mois, contre 307 euros pour les jeunes urbains du même âge.

D'autant qu'aux kilomètres s'ajoute la problématique des transports en commun, dont l'offre souvent "insuffisante" ne permet pas de compenser l'éloignement. Plus d'un jeune rural sur deux déclare ainsi être mal desservi par un réseau de bus.

Culture, études, travail, "les renoncements se multiplient"

"Se rendre en cours, s’engager dans une association, faire les courses, effectuer une démarche administrative, recevoir des soins", toutes les activités du quotidien sont ainsi compliquées par ce manque de mobilité, souligne l'étude. "Pour toutes ces raisons, un tiers des jeunes ruraux (32 %) ne pratiquent aucune activité extrascolaire". Et ces contraintes ont poussé près d'un jeune rural sur deux à renoncer à la pratique d’une activité culturelle.

Au moment des études, la fracture se fait à nouveau sentir : 70% des formations post-bac se situent dans les grandes métropoles, obligeant les jeunes ruraux à "bouger pour se former", pour s'installer dans "une grande ville coûteuse sur les plans financier et matériel". Et au moment de construire son projet professionnel, 38 % des jeunes ruraux en recherche d’emploi disent avoir déjà renoncé à passer un entretien d'embauche en raison de difficultés de déplacement. C’est 19 points de plus que leurs homologues urbains.

Bref, une "accumulation d'entraves" contraint les jeunes ruraux à "se priver de culture, faire un trait sur la poursuite de leurs études, renoncer à une expérience à l’étranger, orienter leur premier emploi en fonction des trajets, choisir entre loisirs et carburant quand ils font leurs comptes", et "les renoncements se multiplient", résume l'étude en conclusion.

Des politiques publiques insuffisantes

"Les jeunes ruraux et leurs contraintes ne sont presque jamais intégrés dans la conception et la mise en place des politiques publiques ou des dispositifs privés", dénonce l'étude, qui prend l'exemple du pass Culture, qui "ne permet pas de compenser l’éloignement des jeunes ruraux des lieux" culturels.

Ou encore du dispositif Erasmus : "Contrairement à un préjugé courant", "près de 8 jeunes ruraux sur 10 affirment qu’ils aimeraient un jour vivre à l’étranger". Or les "zones urbaines" et leur "concentration des ressources" rendent l'"expatriation plus accessible". Résultat, chez les moins de 29 ans, un rural sur six (17%) a eu l'opportunité de vivre à l'étranger pour une période de plus de trois mois, contre près d'un sur trois pour un jeune urbain (27%).

Les auteurs appellent à "tenir compte de ces territoires et de leur jeunesse, afin de ne pas reproduire des inégalités et d’éviter des mécanismes d’exclusion". "En l’absence d’une telle logique, ces jeunes continueront de se sentir victimes d’inégalités, incompris par des institutions qui ne s’adaptent pas à leur quotidien", anticipent-ils. "Au risque de fragiliser plus encore la cohésion nationale".

Lien entre mobilité limitée et vote RN

L'étude de l'Institut Terram et Chemins d'avenir analyse également les liens entre mobilité et vote. "Les entraves à la mobilité des jeunes ruraux alimentent le vote en faveur du Rassemblement national", notent les auteurs. "Il est frappant de constater que ce sont les jeunes ruraux dont la mobilité est quotidiennement difficile qui sont les plus nombreux à porter leur dévolu sur la droite radicale".

Ainsi, "plus le temps passé en voiture est long, plus le vote pour la candidate du RN croît : 34 % pour ceux qui sont moins de 30 minutes par jour dans leur automobile, 43 % entre 30 et 59 minutes, 42 % entre 1 et 2 heures et 49 % pour plus de 2 heures". L'étude cite aussi comme élément déterminant du vote "l’isolement géographique" ou encore "les critères socio-économiques".

La santé mentale des jeunes ruraux

Le manque de mobilité participe enfin à "l'autocensure" des jeunes ruraux, qui "internalisent des limites perçues, réelles ou imaginaires". Ils "sont ainsi 48 % à choisir des études supérieures qu’ils qualifient d’ambitieuses, contre 67 % chez leurs camarades d’agglomération parisienne". Un phénomène qui "peut se traduire par un sentiment d’incompétence ou d’impuissance, voire favoriser des moments d’anxiété".

Alors que la santé mentale des jeunes Français est dégradée depuis le début de la pandémie de Covid-19, les jeunes ruraux sont les plus affectés, note l'étude : 76 % d'entre eux disent avoir connu des périodes intenses de stress, de nervosité ou d’anxiété, la moitié d’entre eux parlent d’épisodes de dépression (49 %) et 35 % de ces jeunes affirment avoir déjà eu des pensées suicidaires, soit plus d'un sur trois.

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