Rugby, l’histoire de Louis Cancel

Vous nous avez parlé Hélène des sept champions de France de l’ASP (7 sur 15 c’est la moitié de l’équipe !) mais d’autres rugbymen, moins connus, sont aussi tombés au front …

Le nom de ce grand gaillard ne vous dira sans doute rien. Ce 3e aile aux moustaches à la gauloise, fougueux, rapide et sûr, ne figure pas au côté des champions de France 1914. Et pour cause, il a quitté le club à la fin de la saison précédente. 

Louis Cancel fait partie de l’équipe que le gallois Rowland Griffith prend en main à l’été 1912 et qu’il va façonner à sa manière en mettant au point, sur mesure, ce qu’on appelle aujourd’hui le « jeu à la catalane ». Et Cancel en est un des pièces maîtresses. Il est militaire et au printemps, 1913 donc, il obtient une permission spéciale pour aller se marier dans un petit village de l’Ariège. Le problème, c’est que l’ASP se qualifie pour les demi-finales du championnat et que cette demi-finale doit avoir lieu le lendemain de la cérémonie. L’ASP va-t-elle devoir affronter le SCUF, le Sporting Club Universitaire de France, une équipe parisienne, sans Louis Cancel ? Le match a lieu à Toulouse. 

A minuit, la nuit précédente, Pierre Ducup de St Paul, le petit-fils de Pierre Bardou-Job, que tout le monde appelle affectueusement « Pierrot » et qui est le président de l’ASP, prend sa voiture et file de Toulouse à Pamiers. Enfin quand je dis « file », c’est une voiture du tout début du XXe siècle et les routes pareil ! Il fait irruption au beau milieu de la fête et enlève littéralement le nouveau marié des bras de sa charmante épouse qui doit se résoudre à voir sa nuit de noce disons reportée ! Le lendemain, sur le terrain des Ponts Jumeaux, Louis joue le plus étourdissant match de sa carrière. 

Malheureusement, ce n’est pas suffisant, l’ASP s’incline face au SCUF. Il n’y aura pas de finale pour les Perpignanais. La plupart d’entre eux se rattraperont l’année suivante mais pas Louis Cancel qui quitte le club donc à la fin de la saison pour partir en poste en Afrique avec sa jeune femme enceinte. C’est de là qu’il va suivre, en se morfondant, l’épopée de ses anciens coéquipiers et la conquête de leur premier Bouclier de Brennus.

Et puis c’est la guerre …

A Constantine où il est basé, Cancel trouve qu’il est trop loin du front. Il demande à passer dans les zouaves. Nommé sergent-éclaireur, il est envoyé dans les Dardanelles contre l’Empire Ottoman allié à la Prusse et à l’Autriche Hongrie. Il est blessé une première fois, remonte au front et il est à nouveau touché. Il meurt à l’été 1915 à bord du vaisseau-hôpital La Bretagne au large du cap Hellès.